Cataracte : quand ce n’est pas l’âge

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Publié le 04/07/2024
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Les cataractes non séniles, dites « non pathologiques » regroupent celles qui ne sont pas liées au vieillissement. Traumatismes et myopies fortes sont au premier plan.

Une chirurgie à risque chez le myope fort

Une chirurgie à risque chez le myope fort
Crédit photo : BURGER/PHANIE

Les cataractes non liées à l’âge relèvent d’origines diverses, parmi lesquelles les traumatismes oculaires et la myopie forte sont des causes fréquentes. Elles sont distinctes aussi des cataractes « secondaires », opacification de la capsule postérieure qui complique parfois à distance l’opération de la cataracte.

Après un trauma : une potentielle urgence

Une personne sur cinq environ subit un traumatisme oculaire significatif au cours de sa vie, les plus souvent concernés étant les adultes jeunes de sexe masculin, généralement entre 20 et 30 ans.

Le pronostic dépend de l’acuité visuelle initiale, de la présence ou non d’un réflexe pupillaire, de la sévérité du traumatisme et des lésions oculaires associées au niveau de l’iris, de la rétine ou de la cornée. On pourrait décrire pratiquement autant de cataractes traumatiques que de patients, mais il faut séparer les traumatismes par contusion et perforants, dont la prise en charge diffère.

La cataracte contusive peut se développer immédiatement après le choc, mais peut aussi être d’apparition retardée, parfois plusieurs années après le traumatisme. Le risque est d’autant plus élevé que l’objet responsable du traumatisme est petit. Il faut toujours rechercher des lésions associées au niveau du cadre orbitaire ou du massif facial, une atteinte de l’iris, de l’angle (avec un risque de glaucome traumatique), du pôle postérieur avec parfois un décollement de la rétine.

La cataracte secondaire à un traumatisme perforant est une urgence, avec parfois une intervention immédiate en cas d’ouverture capsulaire, susceptible de provoquer une inflammation avec hypertonie oculaire. Un corps étranger intraoculaire doit être recherché au niveau du cristallin ou de la rétine en s’aidant si besoin de la radiographie. « Le risque d’atteintes associées impose une évaluation précise préopératoire ; il faut aussi savoir rester mesuré sur le pronostic avant l’intervention, les surprises désagréables n’étant pas rares dans cette situation », insiste Pr Marc Muraine (CHU de Rouen). La chirurgie est plus complexe que dans la cataracte sénile, et requiert des opérateurs entraînés surtout en cas de lésions associées, avec un suivi postopératoire très serré. Il ne faut pas hésiter à opérer en plusieurs étapes, en particulier en cas de cataracte perforante.

Myopie forte : un risque majeur

La myopie forte (longueur axiale > 26 mm) multiplie par trois le risque de cataracte nucléaire et par huit celui de cataractes sous-capsulaires postérieures.

Les complications de la chirurgie sont, elles aussi, bien plus fréquentes en cas de myopie forte : les ruptures capsulaires en peropératoire sont deux fois plus nombreuses (2 à 6 % des cas), le risque de décollement de rétine (DR) postopératoire est multiplié par cinq (1,4 à 2,7 % par an) ; il existe aussi un risque plus élevé de maculopathie myopique (2 à 9 %), de contraction capsulaire (2 %), de luxation de l’implant (0,6 %) et d’hypertonie oculaire (20 à 36 %).

On sait que le risque de DR est d’autant plus important dans la myopie forte qu’elle est associée à une cataracte, en raison d’un décollement du vitré bien plus précoce chez les myopes forts (10 à 20 ans plus tôt) et des adhérences vitréennes plus importantes. Et la rupture capsulaire multiplie par 10 à 12 le risque de DR.

L’intervention pour cataracte chez le myope fort est une chirurgie à risque, qui nécessite une préparation rigoureuse : modalités de correction à prévoir ultérieurement, examen à la lampe à fente en particulier sur la mobilité cristallinienne et la zonule, fond d’œil à la recherche d’une maculopathie, etc. Le laser peut parfois être employé préventivement sur certaines adhérences. « Néanmoins, si cette chirurgie est difficile, elle est efficace, avec un fort impact sur la qualité de vie du patient », rassure la Dr Barbara Ameline-Chalumeau (Paris).

Dr Maia Bovard-Gouffrant

Source : Le Quotidien du Médecin