LA REVALORISATION de certains actes médicaux ou chirurgicaux, en ORL comme dans les autres spécialités, est en général un processus au long-cours. « La CCAM (classification commune des actes médicaux) a été fixée en 2004 et nous en sommes à la version 21 », explique le Pr Jean-Marie Faugère, président de la Commission de la nomenclature de la Société française d’ORL. Dans la version 12, en 2006, un certain nombre d’actes de chirurgie ORL, mal valorisés au départ, ont subi un réajustement. « Mais il reste aujourd’hui encore des actes qui restent sous côtés et sur lesquels la Commission de la hiérarchisation des actes doit se prononcer. Le problème est que tout cela prend du temps. Un processus en trois étapes a été fixé. Nous en avons passé deux, il en reste une troisième », indique le Pr Faugère, en précisant que la négociation avec l’Union nationale des caisses d’assurance-maladie (Uncam) se fait à enveloppe constante. « On se place donc dans une logique du « rabot » ou de « vases communicants ». Cette logique est toute simple : quand on veut revaloriser un acte, il faut en baisser un autre ».
Le Pr Faugère reconnaît qu’aujourd’hui, certains d’actes d’ORL sont insuffisamment valorisés. « C’est le cas par exemple de certains actes de posturographie, qui ne doivent pas être négligés. Le problème de l’équilibre est particulièrement important, en particulier chez les sujets âgés. On peut aussi citer le cas de la chirurgie du sinus par méatotomie qui, de façon assez surprenante, n’est pas considérée comme un acte chirurgical par la CCAM mais comme une technique médicale. La CCAM, en effet, la considère comme une endoscopie. Il s’agit certes d’une endoscopie mais à visée chirurgicale. On ne fait pas une exploration pour examiner un sinus mais bien pour traiter ce sinus C’est un peu comme si on disait aux chirurgiens viscéraux qu’une appendicectomie réalisée sous endoscope n’est pas un acte chirurgical », explique le Pr Faugère. « En fait, la CCAM semble partagée entre deux attitudes. En effet, bien qu’elle considère cette chirurgie comme un acte de technique médicale, elle lui a mis un J chirurgical ».
Au cours des dernières années, certains actes ont, en revanche, été revalorisés. « Cela a été le cas, par exemple, de l’audiométrie et de la fibroscopie du cavum qui sont des actes très fréquents en cabinet. On peut aussi citer les implants du tronc cérébral qui sont des actes très pointus de la chirurgie de la surdité, qui touchent l’oreille interne et le nerf auditif », indique le Pr Faugère.
Les étapes.
Ce travail de revalorisation est conduit sous l’égide de la Commission de la nomenclature de la Société Française d’ORL. « Le rôle de cette commission est d’abord de recueillir toutes les informations en provenance des ORL. Ces derniers ne doivent pas hésiter à nous faire part de toutes leurs observations ou questions sur la sous-valorisation ou même la non-valorisation de certains actes nouveaux, qui ne sont pas encore dans la nomenclature. Ensuite, ces actes sous-valorisés ou non-valorisés font l’objet d’une évaluation par la commission de la nomenclature. C’est à partir de ce travail, qui est notamment bibliographique, que nous allons ensuite élaborer notre argumentaire pour réclamer telle ou telle revalorisation », détaille le Pr Faugère.
Ensuite, le dossier est transmis à la Haute autorité de santé (HAS). Si celle-ci valide l’acte, c’est à la commission de la hiérarchisation des actes de se prononcer. « Au départ, il y a un travail largement médical et scientifique. Ensuite, ce sont nos collègues syndicalistes qui prennent le relais pour la négociation des tarifs », précise le Pr Faugère.
Selon lui, la sous-valorisation de certains actes peut parfois placer les médecins dans une situation difficile. « Je suis aussi expert près de la Cour d’appel. À travers les dossiers que je vois passer, il est clair qu’on demande aux médecins de traiter les patients en se basant sur les données actuelles de la science. Mais dans certains cas, « l’état actuel de la science » correspond à des techniques coûteuses et pas toujours valorisées à leur juste valeur. Sur le plan humain et déontologique, le praticien se doit de donner le meilleur à son patient. Mais parfois, le meilleur a un coût que le praticien ne peut assumer tout seul », estime le Pr Faugère, en citant l’exemple de la chirurgie assistée par ordinateur. « Aujourd’hui, il est reconnu qu’il est préférable d’avoir recours à la navigation assistée pour toute la chirurgie de la base du crâne et donc la chirurgie de deuxième intention des sinus. Le geste est plus précis et moins risqué. Le problème est qu’aujourd’hui, la navigation assistée n’est pas valorisée alors que l’appareil coûte environ 50 000 euros ».
D’après un entretien avec le Pr Jean-Marie Faugère, président de la Commission de la nomenclature de la Société Française d’ORL.
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