LA CYSTITE est considérée comme récidivante à partir du quatrième épisode annuel ou du troisième sur une période de six mois. Il s’agit d’un problème fréquent : sur les 4 à 5 millions d’épisodes annuels d’infection urinaire en France, de 15 à 20 % vont récidiver, ce qui représente de 800 000 à 1 million de cas chaque année.
La cystite récidivante concerne majoritairement les femmes, les hommes souffrant plus fréquemment d’une prostatite aiguë ou chronique.
« L’épisode de cystite doit être prouvé bactériologiquement dans le cadre des études cliniques. En revanche, en pratique quotidienne, le recours à une bandelette urinaire au cabinet médical suffit dans la grande majorité des cas. Une bandelette négative permet d’éliminer le diagnostic (valeur prédictive négative élevée, de l’ordre de 95 %). Sa valeur prédictive positive est plus faible, mais lorsque la symptomatologie est cohérente (brûlures mictionnelles et pollakiurie), il n’est pas nécessaire de réaliser un examen cytobactériologique des urines (ECBU), souligne le Pr Henry Botto. La présence d’une hématurie, fréquente (prévalence de 18 % dans l’étude ARESC) n’est pas un signe de gravité. »
Face à une patiente souffrant de cystite récidivante, il est fondamental de faire un bilan clinique a minima, afin de ne pas méconnaître une cystite avec facteur compliquant : prolapsus, sténose du méat urétral, calcul vésical, dyssynergie vésicosphinctérienne… L’interrogatoire est à cet égard essentiel : impériosité, urgenturie, qualité du jet, déclenchement par les rapports sexuels, diurèse, antécédents de colique néphrétique…
« Ce bilan peut ainsi conduire à une demande d’exploration telle qu’une échographie vésicale ou d’un avis urologique. Le scanner n’a pas de place en première intention et l’urographie intraveineuse “a vécu?? », rappelle le Pr Botto.
Le colibacille le plus souvent en cause.
L’épidémiologie bactérienne des cystites communautaires a peu évolué. En France, le colibacille reste le principal germe en cause (plus de 85 % des cas) ; le staphylocoque est un germe de récidive et les entérocoques sont des bactéries hospitalières.
Ce profil épidémiologique guide la stratégie thérapeutique. Dans la cystite simplex, le traitement probabiliste doit être le plus court possible ; il se fonde sur une antibiothérapie en dose unique ou sur trois jours. Dans les cystites récidivantes, chaque épisode est traité selon ce même principe.
« Mais se pose bien sûr la question de l’antibiothérapie prophylactique des récidives, pour laquelle nous sommes actuellement démunis. Les colibacilles sont en effet résistant dans 50 à 60 % des cas à l’amoxicilline, dans 40 à 50 % des cas à l’association amoxiciline-acide clavulanique et de plus en plus de souches sont résistantes aux fluoroquinolones, qu’il faut impérativement économiser. Il ne reste que l’association fosfomycine-trométamol, qui doit être réservée aux épisodes aigus afin de ne pas favoriser la survenue de résistances, et la nitrofurantoïne, dont les effets secondaires empêchent sa prescription au long cours. C’est pour cette raison qu’il faut développer d’autres modalités thérapeutiques, expose le Pr Botto. Les extraits de cranberry, qui ne sont pas un médicament, mais un complément alimentaire, représentent l’une de ces voies. Mais tous les extraits de cranberry ne sont pas équivalents. »
Il existe en effet deux grands types de cranberry, l’un nord-américain (canneberge Vaccinium macrocarpon), efficace sous certaines conditions, l’autre européen, sans aucun effet prophylactique. L’efficacité du cranberry nord-américain découle de la présence de PAC A (proanthocyanidine de type A), qui agit en s’opposant à la fixation des colibacilles sur l’uroépithélium, qui constitue la première étape de l’infection urinaire. En 2008, l’Afssaps a retenu une dose quotidienne de 36 mg de PAC A pour réduire le risque de cystites, sans toutefois préciser la méthode de dosage utilisé. De ce fait, de nombreux compléments alimentaires sont aujourd’hui sous-dosés.
« En France, un seul produit (Urell) a pour l’instant fait la preuve de son efficacité sur le risque de récidive chez des patients un peu particuliers, avec vessie de remplacement. Une vaste étude va prochainement être lancée en France, versus placebo, dans la prévention des cystites récidivantes chez des femmes âgées de 18 à 65 ans. Le cranberry existe également sous la forme de jus, dont l’efficacité pour l’un deux (Ocean Spray) a été démontrée dans une population de femmes en maison de retraite. Mais son utilisation peut être limitée à cause de sa teneur en sucre, non négligeable, et la contrainte liée au volume qui doit être consommé, comme en témoigne le nombre élevé d’abandons dans les études. Les mesures préventives classiques (diurèse suffisante, régulation du transit, miction juste après les rapports sexuels…) restent d’actualité », conclut le Pr Botto.
D’après un entretien avec le Pr Henry Botto, hôpital Foch, Suresnes, membre de l’Association française d’urologie (AFU).
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