Les charges contre les nitrites s’accumulent. Déjà pointées du doigt vis-à-vis du cancer colorectal, ces molécules pourraient aussi avoir un impact sur le métabolisme glucidique comme le suggère une étude de cohorte française publiée le 17 janvier dans la revue Plos Médicine. Ce travail montre pour la première fois à grande échelle, un lien entre exposition alimentaire à ce type de molécules et risque accru de diabète de type 2.
Les nitrites et nitrates sont des composés répandus dans l’alimentation. Car non seulement ces molécules se révèlent naturellement présentes « dans certains aliments (notamment les légumes) ainsi que l’eau (y compris de boisson) et les sols », rappelle l’Inserm dans un communiqué. Mais de plus, des « pratiques agricoles et industrielles » augmentent la teneur en nitrates ou nitrites de nombre de denrées. À l’instar des charcuteries et autres viandes transformées, où ces substances sont utilisées comme additifs dans le but « d’augmenter (les) durée de conservation » ou de « donner une couleur rose aux jambons », explique l’Inserm. Selon l'instance « plus de 15 000 produits emballés sur le marché français contiennent actuellement des nitrites ou des nitrates ajoutés ».
Or depuis quelques années, les nitrates et nitrites n’ont pas bonne presse, puisqu'ils sont pointés comme associés à un surrisque de cancer colorectal. Si bien qu’en 2022, l’Agence nationale de sécurité sanitaire et alimentaire (Anses) a préconisé de réduire leur utilisation.
En outre, un rôle potentiel des nitrites et des nitrates dans d'autres pathologies est évoqué. Et des « études expérimentales (ont) déjà suggéré une association entre l’exposition aux nitrites et aux nitrates et l’apparition de dysfonctionnements métaboliques », rapporte l’Inserm. Toutefois, les données sur cet impact métabolique potentiel restaient jusqu’à présent parcellaires.
Les additifs nitrités associés à un surrisque de diabète de 53 %
Pour combler cette lacune, des chercheurs de l’Inserm, de l’Inrae, de la Cnam et d’Universités parisiennes se sont penchés sur les données de plus de 100 000 participants de la cohorte prospective NutriNet-Santé suivis entre 2009 et 2021, à la recherche de l’apparition d’un diabète de type 2 chez ces sujets – non diabétiques à leur inclusion. Par ailleurs, l’équipe a examiné l’exposition déclarée aux additifs nitrités par la description exhaustive des repas des volontaires, indiquent les auteurs de l'étude. L’exposition aux nitrates et nitrites naturels a aussi été prise en compte par des données de contrôle des eaux et des sols transmises par les autorités sanitaires, ajoute l’Inserm.
Résultat : « les participants ayant une exposition plus élevée aux nitrites (…) présentaient un risque plus élevé de développer un diabète de type 2 », résume l’Inserm. Et ce, même après ajustement sur des éléments nutritionnels, d’activité physique, etc. De fait, les participants les plus exposés aux nitrites à la fois additifs et naturels présentaient un risque accru de 27 % par rapport aux volontaires les moins exposés. Et « les participants les plus exposés aux nitrites d’origine additive, et tout spécialement (...) au nitrite de sodium, avaient un risque de diabète de type 2 plus élevé (encore) par rapport à ceux qui n’étaient pas exposés », ajoutent les auteurs, qui rapportent cette fois-ci un Hazard Ratio d’1,53.
Les nitrates disculpés
L’étude tend par contre à disculper les nitrates. « Aucune association entre l’exposition aux nitrates et le risque de diabète de type 2 n’a été retrouvée », rapporte l’Inserm.
Quoi qu’il en soit, « ces résultats fournissent un nouvel élément de preuve dans le contexte des discussions actuelles concernant la nécessité d’une réduction de l’utilisation des additifs nitrités dans les viandes transformées par l’industrie alimentaire, et pourraient également soutenir la nécessité d’une meilleure réglementation de la contamination des sols par les engrais », plaident Bernard Srour et Mathilde Touvier, co-pilotes de cette étude.
À noter toutefois que se passer totalement des additifs nitrités apparaît difficile. Comme le soulignait l’Anses dans son rapport, « la réduction de leur utilisation aussi bas que raisonnablement possible peut être envisagée à la condition impérative de prendre des mesures pour maîtriser le risque de contamination par des bactéries par d’autres moyens ». Moyens qui excluent certaines alternatives bio (extraits et bouillons végétaux), qui « contiennent (en réalité) naturellement des nitrates qui, sous l’effet de bactéries, sont convertis en nitrites », ajoute l’Anses.
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