Les co-infections par le SARS-CoV-2 et d’autres pathogènes respiratoires saisonniers tels que les virus grippaux et les adénovirus pourraient être associées à un surrisque de décès. C’est ce que suggère une étude anglaise rapportée le 25 mars dans le Lancet.
Une co-circulation inédite
« Comme de nombreux pays réduisent l'utilisation des mesures (barrière), nous nous attendons à ce que le SRAS-CoV-2 circule avec d'autres virus respiratoires », affirment les auteurs de l'étude. Une prévision qui se vérifie déjà en France, où ce début de printemps apparaît marqué par une recrudescence de la circulation du SARS-CoV-2, mais aussi des virus grippaux. De fait, selon Santé Publique France, en semaine 11 – soit entre le 14 et le 20 mars –, la totalité des régions métropolitaines étaient en phase épidémique. De quoi « augmenter le risque de co-infections », soulignent les chercheurs.
Cette situation de co-circulation intense des pathogènes saisonniers et du SARS-CoV-2 étant inédite, les données manquent encore sur les co-infections, et en particulier sur leur gravité. « Les caractéristiques cliniques des co-infections virales respiratoires avec le SARS-CoV-2 (restent) inconnues », déplorent les auteurs.
Dans ce contexte, ces chercheurs des Universités de Liverpool, d’Edimbourg et de Leiden ont sélectionné, parmi plus de 200 000 adultes hospitalisés pour Covid-19 au Royaume-Uni entre février 2020 et décembre 2021, ceux qui disposaient aussi d’un résultat de test grippe, adénovirus ou VRS. Une démarche qui les a conduits à identifier près de 7 000 adultes testés pour ces pathogènes, dont une large majorité (près de 6 400) s’avéraient en fait monoinfectés par le SARS-CoV-2. Près de 600 individus présentaient cependant bien une co-infection confirmée avec un influenza virus pour 227 personnes, avec le VRS dans 220 cas, ou avec un adénovirus chez 125 patients. Ainsi s’agit-il, pour les auteurs « de la plus grande étude sur les personnes atteintes de Covid-19 ayant reçu un test supplémentaire pour les virus respiratoires endémiques » disponible à ce jour.
Les chercheurs ont alors comparé l’état de santé des adultes monoinfectés par le SARS-CoV-2 à celui des malades contaminés à la fois par le SARS-CoV-2 et un des trois autres virus respiratoires.
Davantage de décès en cas de co-infection avec la grippe ou avec un adénovirus
Résultat : les co-infections par le SARS-CoV-2 d’une part et par un virus grippal ou un adénovirus d’autre part semblent plus délétères qu’une infection à SARS-CoV-2 seule.
En effet, dans ce travail, la co-infection par des virus grippaux a été associée à une probabilité accrue de nécessiter une ventilation mécanique invasive par rapport à la monoinfection par le SARS-CoV-2 (OR 4,14).
Par ailleurs, « les co-infections par le SRAS-CoV-2 avec des virus de la grippe et des adénovirus étaient chacune significativement associées à une augmentation des risques de décès », avec des OR de 1.53 pour la co-infection à adénovirus et de 2.35 pour la co-infection à influenzavirus après régression multivariée pondérée.
À noter que la co-infection SARS-CoV-2/VRS ne semblait associée à aucun surrisque d’admission en réanimation ni de décès.
Un effet protecteur de la vaccination ?
Mais reste à connaître l’impact réel que pourraient avoir ces co-infections sur la morbidité actuelle à l’hôpital. Car cette étude comporte plusieurs limites, et des inconnues demeurent.
À commencer par l’effet des vaccinations anti-Covid-19 comme antigrippale – qui pourrait abaisser la sévérité des co-infections. « Étant donné que les données de vaccination contre les virus de la grippe n'étaient pas enregistrées dans la base de données étudiée et que la plupart des patients avaient été admis avant que les vaccins COVID-19 ne soient disponibles, nous n'avons pas été en mesure d'établir l'effet (de ces vaccins) sur les co-infections par rapport aux monoinfections », admettent les auteurs.
De plus, cette étude ne s’est penchée que sur des patients contaminés avant le 8 décembre 2021, date à laquelle Omicron était encore minoritaire. Or la moindre sévérité de ce variant a depuis été confirmée.
En outre, l’âge médian des adultes présentant une co-infection inclus dans ce travail apparaît élevé – de 68 ans pour les patients présentant une co-infection SARS-CoV-2/influenzavirus. Or il semble que l’épidémie de grippe touche cette année surtout les jeunes. C’est en tout cas ce que suggère le dernier point épidémiologique de Santé publique France ainsi que les chiffres de la base THIN fournis par GERS Data. « Pour les semaines 12 et 13 de 2022, la moyenne d’âge est d’environ 30 ans, comme en 2016. Habituellement, la moyenne d’âge des patients est autour de 40 ans », détaille Béranger Lekens, expert des données en vie réelle de GERS Data. Or les jeunes sont moins à risque à la fois de forme grave de grippe comme de Covid-19.
Quoi qu’il en soit, aux pour les auteurs, l’étude plaide pour un maintien de la vigilance. « Premièrement, nos résultats apportent un soutien supplémentaire à la vaccination contre le SRAS-CoV-2 et les virus de la grippe. Deuxièmement, ils suggèrent que le dépistage des virus de la grippe est important chez les patients hospitalisés atteints de Covid-19 pour identifier les patients à risque. »
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