Le ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin a déclaré : « Certains médecins osent encore certifier qu’une femme est vierge pour permettre un mariage religieux, malgré la condamnation de ces pratiques par le Conseil de l’ordre des médecins. On va non seulement l’interdire formellement, mais proposer la pénalisation. » Le certificat de virginité est à proscrire, au moins à quatre titres, d’abord scientifique, puis législatif, déontologique et enfin il fait perdurer une coutume archaïque violente envers les filles.
Au point de vue scientifique, il est inutile de rappeler à des médecins ce qu’est l’hymen et que cette membrane peut être rompue au cours de la vie quotidienne. Le rapport de l’OMS de 2018 sur les « tests de virginité » dénonce la violation de plusieurs droits des femmes et des filles et précise qu’ils n’ont aucune valeur scientifique. Le Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF) réclame l’interdiction ainsi que des sanctions pénales pour les médecins impliqués.
Au point de vue législatif, en attendant une loi qui spécifierait l’interdit, plusieurs articles du code de santé publique prohibent un tel certificat : « Le médecin doit, sans négliger son devoir d’assistance morale, limiter ses prescriptions et ses actes à ce qui est nécessaire à la qualité, à la sécurité et à l’efficacité des soins. » (Art. R.4127-8). Il ne s’agit pas de soins mais de soumission à une tradition. « La délivrance d’un rapport tendancieux ou d’un certificat de complaisance est interdite. » (Art. R.4127-28) « Le médecin ne doit pas s'immiscer sans raison professionnelle dans les affaires de famille ni dans la vie privée de ses patients. » (Art. R.4127-5)
Le secret médical, une règle absolue
Le secret professionnel est également une règle absolue. Comme le certificat en question vise à informer des tiers (sinon à quoi servirait-il ?), il est en lui-même une infraction au secret médical que les ordres doivent sanctionner. À défaut les procureurs.
Quelques médecins, en France, se font grassement payer pour cet acte : vérifier si l’hymen est intact, que la jeune fille est « propre » avant le mariage. On attendrait plutôt de leur part des explications anatomiques sur cette membrane et sur le fait que toutes les femmes ne saignent pas lors du premier rapport sexuel. Plusieurs gynécologues, mieux inspirées dans leurs actions contre l’excision, ont déclaré avoir établi des certificats de virginité pour « protéger » des jeunes filles, sans les examiner. Elles et ils légitiment la demande des parents et permettent à ces pratiques néfastes de perdurer.
Le certificat de virginité est avilissant. Même s’il reste marginal (pratiquants d'un islam rigoriste ou des familles roms), c’est une violation des droits individuels : le respect de l'intimité, la dignité et la liberté des filles qui les subissent. Le non-respect et l’intrusion dans l’intimité physique et psychologique des jeunes filles pour établir ce certificat sont inacceptables. Cette violence est un trouble à l’ordre public et, à ce titre, doit être interdite par la loi.
Les certificats de virginité sont également intolérables car ils sont la matérialisation de la pression psychologique qui s’exerce dès la petite enfance sur les filles. La satisfaction sexuelle du futur mari est omniprésente dans leur éducation. L’honneur de la famille, la réussite de la fonction d’éducatrice des mères seraient attestés par la virginité de leurs filles lors du mariage. Les injonctions maternelles sont nombreuses et variées, en particulier pour éviter une « rupture » intempestive de l’hymen : ni tampon hygiénique, ni activités sportives, ni masturbation.
Le certificat de virginité est demandé par les parents, pour des filles souvent mineures, afin de pouvoir prouver qu'elles sont vierges au moment du mariage religieux. Qu’en est-il du consentement, de la violation de l’âge légal du mariage ? Cette pratique constitue en outre une discrimination envers les femmes. Est-ce qu'un certificat de virginité est demandé aux garçons ?
Il est donc urgent de réprimer sévèrement cette pratique archaïque qui porte atteinte aux jeunes filles. L'éducation sexuelle des jeunes, filles et garçons, est une priorité afin de lutter contre l'ignorance et la désinformation. Une loi punissant, par peine renforcée, cet acte dissuaderait les familles et les médecins. Elle permettrait aux jeunes filles de s'opposer aux requêtes abusives de leurs parents. Les peines encourues pourraient être des amendes à l'encontre des parents comme des médecins, avec la suspension temporaire d’exercer, mais aussi des journées de sensibilisation afin de faire évoluer les mentalités.
Établir des certificats de virginité sous prétexte que cela protégerait des filles de violences familiales, c’est accepter les violences intrafamiliales, tolérer cette tradition néfaste et participer à son maintien. En réponse, poser l’interdit par la loi et pénaliser les auteurs est nécessaire, comme pour toute violence faite aux femmes et aux filles.
Exergue : Prévenir par l’éducation, poser l’interdit par la loi et pénaliser les auteurs est nécessaire, comme pour toute violence faite aux femmes et aux filles.
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