Médecins du Monde assigné en justice par la préfecture du 93

La « maltraitance de fait » des Roms d’Ile-de-France

Publié le 25/06/2009
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C’EST UNE PREMIÈRE judiciaire. MDM, que soutiennent plusieurs associations (Secours catholique, Fondation Abbé Pierre) comparaît ce matin en référé devant le tribunal de grande Instance de Bobigny pour avoir dressé un camp de « déplacés européens » à Saint-Denis, ce qui constituerait une « occupation illicite d’un terrain sous la propriété de l’État ». Sept tentes des missions internationales pour l’hébergement, 1 tente de consultations médicales, des toilettes chimiques et des bennes pour l’évacuation des déchets ont été installés le 26 mai pour abriter 116 personnes, parmi lesquelles 41 enfants et 5 femmes enceintes.

« En l’absence de toute solution même provisoire, explique le Dr Olivier Bernard, nouveau président de l’association, ce dispositif constitue une réponse exceptionnelle à un problème récurent : l’accueil des populations Rroms en France. Ces familles ne sont pas en situation irrégulière, puisqu’il s’agit d’Européens. Mais Ils sont trop souvent considérés comme des sous-citoyens et régulièrement interpellés par les forces de l’ordre. »

De fait, au cours des deux derniers mois, les mêmes familles venues pour la plupart de Roumanie ont été expulsées à cinq reprises. Le 23 mai, un incendie se déclenchait dans un hangar de Bobigny où elles avaient trouvé refuge, entraînant la mort d’un enfant de 10 ans. Selon MDM, la préfecture de Seine-Saint-Denis s’était alors engagée à organiser une table ronde pour faire le point avec les élus sur la situation des Roms, semblant accéder au vœu exprimé, depuis des années, par les associations. Mais dès le 26 mai, les forces de l’ordre expulsaient les déplacés du gymnase où ils s’étaient réfugiés. C’est cette dernière intervention qui, la nuit suivante, a décidé les équipes de MDM à mobiliser des moyens habituellement destinés aux urgences internationales, avec la mise en place d’une veille sanitaire.

Tableau médical alarmant.

Le tableau médical des 116 Roms pris en charge est alarmant : une femme souffre d’une surinfection de la cicatrice consécutive à une césarienne ; un bébé de 2 mois attend une intervention chirurgicale pour traiter une malformation cardiaque ; un bébé de 3 mois nécessite des soins post-opératoires après une intervention pour pieds bots ; deux nouveau-nés sont âgés d’une semaine et un bébé né prématuré est âgé de 6 semaines. MDM signale aussi des syndromes post-traumatiques consécutifs à l’incendie du23 mai.

Médecins du Monde intervient depuis 1992 auprès des populations Roms en région parisienne, à Lyon, Marseille, Nantes, Bordeaux, Aix-en-Provence et Strasbourg, en lien avec le collectif Rromeurope. L’association dénonce «  une maltraitance de fait qui résulte du manque d’engagement des acteurs institutionnels, collectivités locales et territoriales, qui se renvoient en permanence la responsabilité de la situation. » Elle continue de réclamer l’organisation d’une table-ronde régionale qui réunirait enfin tous les acteurs concernés.

 CHRISTIAN DELAHAYE

Source : lequotidiendumedecin.fr