Entretien avec le porte-parole santé du groupe LR de l'Assemblée

Jean-Carles Grelier  (LR) : « J’ai peur qu’on mette le système sous l'autorité de l’hôpital »

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Publié le 14/03/2019
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LE QUOTIDIEN : Dans quel état d’esprit êtes-vous avant d'aborder les débats en séance ?

JEAN-CARLES GRELIER : J’aborde ce projet de loi avec beaucoup d’envie parce que notre système de santé va mal. J’appelle de mes vœux depuis déjà plusieurs mois une réforme en profondeur de la santé mais je suis un peu déçu de ce que je vois arriver !

Il y a des mesures intéressantes, notamment celles relatives à la réforme des études médicales. Mais d’autres dispositions m’inquiètent comme celles qui concernent l’organisation territoriale. La méthode aussi me préoccupe particulièrement. Je trouve le recours aux ordonnances pas très cohérent en période de grand débat national. C’est un choix qui m’a beaucoup déplu car la ministre nous a, jusqu’à présent, plutôt habitués à un esprit de dialogue.

Sur quels sujets serez-vous particulièrement attentif ?

Je me méfie de la suppression du numerus clausus. La ministre annonce 20 % d’augmentation du nombre d’étudiants en médecine alors que les syndicats d’étudiants et la conférence des doyens pensent qu’on ne peut pas aller au-delà de 12 %. On est en train de faire passer le message qu’on aura bientôt demain des médecins partout sur le territoire. Or, la capacité des facultés de médecine ne le permettra pas ! Avec mon groupe, nous proposons que soit menée régulièrement une évaluation soumise au Parlement qui, chiffres à l’appui, donnera la réalité de ce que sera la situation. J’ai déposé un amendement en ce sens. Mon collègue Jean-Pierre Door en a fait autant.

Sur la réorganisation territoriale, j’ai une grosse inquiétude sur les intentions réelles du ministère de la Santé. En laissant les CPTS [communautés professionnelles territoriales de santé] aux mains des ARS [agences régionales de santé], on place la médecine libérale sous l’autorité du ministère. J’ai la même inquiétude avec les futurs hôpitaux de proximité, qui vont "capter" les derniers médecins libéraux. D'autant qu'en faisant sauter le concours de PH, on favorise l'exercice mixte. J’ai peur qu’on mette l’ensemble du système sous l'autorité de l’hôpital et j’ai bien l’intention de le dénoncer très fortement.

Vous allez défendre d’autres amendements ?

Je vais en déposer deux catégories. Une première pour remettre les collectivités locales dans le jeu. L’idée c’est que partout où il y a lieu qu’on recueille l’avis des collectivités, on le fasse. Je souhaite par exemple qu’à l’intérieur des GHT, les élus retrouvent un peu de pouvoir. Ils n’ont pas vocation à tout gouverner mais à être associés aux décisions. Car face aux demandes des populations, ils sont en première ligne.

L’autre série d’amendements consiste à optimiser la compétence de tous les autres professionnels de santé. Il faut réfléchir à l’élargissement du champ de prescription et d’activité des infirmiers et à l’accès direct au kinésithérapeute. Il faut aussi réinvestir les sages-femmes libérales dans le suivi des grossesses mais aussi dans tout le travail de prévention et de dépistage. Il faut repositionner les autres professionnels de santé, aux côtés des médecins, sans concurrence et dans la complémentarité.

Propos recueillis par Martin Dumas Primbault Exergue/Je trouve le recours aux ordonnances pas très cohérent en période de grand débat national

Source : Le Quotidien du médecin: 9732