LE QUOTIDIEN : Les greffons de donneurs de plus de 70 ans sont déjà utilisés. Qu'apporte cette étude par rapport aux connaissances actuelles ?
Pr OLIVIER SCATTON : Le message n'est pas nouveau, mais n'avait pas été montré sous l'angle de la mortalité. Cette étude (dont les résultats sont détaillés en encadré) confirme ce que nous constatons en pratique : l'âge ne doit pas être une limite. Ces nouveaux résultats mettent en évidence le bénéfice individuel à recourir à un greffon âgé.
Habituellement, les greffons dits « marginaux », dont les greffons âgés, étaient réservés aux patients avec une maladie dont la gravité est modérée et donc capables de « supporter » un tel greffon. Cette étude montre que même un patient présentant une maladie grave a tout intérêt à accepter une greffe issue de donneur âgé.
L'étude montre une réticence des médecins eux-mêmes à cette pratique. Comment l'expliquer ?
La réticence chez les médecins vient surtout de l'utilisation des greffons âgés chez des patients certes gravement malades, mais jeunes. Même s'il y a un bénéfice sur le court terme, il est souhaitable de privilégier un greffon plus jeune, qui offrira de meilleures perspectives au patient sur le long terme.
Le greffon issu d'un donneur de plus de 70 ans n'est donc pas un greffon comme un autre…
Il existe plusieurs facteurs de risque qui influencent la survie du greffon, dont l'âge du donneur. L'essentiel est de ne pas les cumuler.
Bien sûr, on va plus facilement donner un greffon âgé à un receveur âgé, pour lequel le pronostic ne sera pas modifié, alors qu'on privilégiera un greffon plus jeune pour un patient de 20 ans. En France, nous tendons vers un système de matching qui tient compte à la fois de l'âge du donneur et du receveur, ce qui permet d'attribuer au receveur le greffon le plus adapté en fonction de son profil.
Mais l'objectif premier est de réduire le nombre de patients inscrits sur la liste et de diminuer le nombre de receveurs qui décèdent avant d'avoir pu bénéficier d'une greffe hépatique. Il y a donc tout intérêt à ouvrir la transplantation aux greffons marginaux.
Quels sont les autres types de greffons marginaux ?
Il s'agit des greffons stéatosiques, des greffons issus de donneurs décédés par arrêt cardiaque - et non pas par mort cérébral - ou encore ceux issus de donneurs ayant eu une hépatite B ou C (mais guéris). Dans ces derniers cas, en raison du risque potentiel de réactivation du réservoir viral, un traitement préventif est mis en place.
Nous utilisons de plus en plus ces greffons. Il n'existe pas de restriction à leur utilisation. Des précautions sont en revanche à prendre. Le temps de conservation dans la glace entre le prélèvement et la greffe doit être limité au maximum par rapport aux greffons « optimaux ».
Ouvrir la greffe à ces greffons permet de soigner davantage de patients, l'impact est réel.
Afin d'optimiser leur utilisation, nous développons, comme pour le rein, un système permettant d'oxygéner le greffon, afin d'améliorer sa qualité pendant la période préimplantatoire.
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