En avril 2020, la dapagliflozine a donné le top départ de la commercialisation en France des inhibiteurs des SGLT2. Du fait de leur bénéfice cardiovasculaire et rénal, les gliflozines permettent de dépasser la vision glucocentrée de la prise en charge du diabète de type 2.
1. Une nouvelle classe d’antidiabétiques en France
En inhibant le co-transporteur de sodium-glucose de type 2, les gliflozines réduisent la réabsorption rénale du glucose et augmentent son excrétion urinaire, d’où un effet anti-hyperglycémiant (- 0,5 à 0,9 % d’HbA1c) et l’absence de risque hypoglycémique.
En décembre 2020, la Haute Autorité de santé (HAS) s’est prononcée en faveur d’un remboursement de deux gliflozines (canagliflozine et empagliflozine) en plus de la dapagliflozine, dans le cadre du diabète de type 2. L’empagliflozine devrait être commercialisée en 2021.
2. La plus-value des gliflozines par rapport aux autres antidiabétiques
Si l’indication des gliflozines concerne le traitement du diabète de type 2, l’avantage de ces médicaments est qu’ils s’avèrent être des protecteurs rénaux et cardiovasculaires, quel que soit le stade d’insuffisance rénale (avec un débit de filtration glomérulaire supérieur ou égal à 25 ml/min/1,73 m2), que les patients soient diabétiques ou non, et alors même qu’ils étaient déjà traités de manière optimale.
La dapagliflozine a d’ailleurs obtenu fin 2020 une extension d’AMM européenne dans l’insuffisance cardiaque (IC) à fraction d’éjection réduite (FEVG < 40 %), indépendamment de la présence d’un diabète de type 2. Un élargissement du périmètre du remboursement est attendu en France dans les prochains mois.
Différentes études ont montré que la dapagliflozine réduit de 26 % le critère composite comprenant l’aggravation de l’insuffisance cardiaque ou le décès d’origine cardiaque (3), que le critère « hospitalisations pour IC ou décès CV » est réduit de 17 % et le risque d’événement rénal de 47 % (4). Chez des patients avec une maladie rénale chronique, la réduction de risque relatif sur le critère de jugement principal (dégradation de la fonction rénale/insuffisance rénale terminale/décès d’origine cardio-vasculaire ou rénale) est de 39 %, aussi bien chez les sujets diabétiques que non diabétiques (5).
Concernant l’empagliflozine, il a été démontré sa supériorité sur le critère composite principal CV, la mortalité CV et totale et les hospitalisations pour insuffisance cardiaque (6). Par ailleurs, l’ajout de l’empagliflozine réduit de 25 % les décès cardiovasculaires, de 30 % les hospitalisations pour IC, et de 50 % les évènements rénaux majeurs (7).
3. En association avec la metformine ou un sulfamide, de l’insuline
Selon la HAS, la place des gliflozines est en deuxième ou troisième ligne pour traiter les patients diabétiques, en association avec la metformine ou, en cas d’intolérance, à un sulfamide et/ou à l’insuline. La prescription de gliflozines cible certains patients, dans une approche personnalisée et préventive sur le plan cardiovasculaire et rénal : patients diabétiques hypertendus ou obèses, ou ayant une maladie cardiovasculaire avérée, une insuffisance cardiaque ou une maladie rénale chronique, tout en respectant les contre-indications.
La dapagliflozine reste non indiquée en cas de FDG < 45 ml/min/1,73 m2. Les études (5) ont pourtant retrouvé un bénéfice en cas de clairance inférieure à 65. Cette restriction devrait être amendée dans les mois qui viennent.
4. Une prescription initiale réservée aux spécialistes
Ces médicaments sont soumis à prescription initiale annuelle réservée aux spécialistes en endocrinologie, diabétologie, maladies métaboliques ou en médecine interne et, depuis peu, aux cardiologues. Le renouvellement peut être effectué par le médecin généraliste.
5. Quelle surveillance ?
Les mycoses génitales et infections urinaires, plus fréquentes au cours des six premiers mois, sont liées à l’élimination urinaire du glucose, observées de façon inconstante dans les études, et rapidement résolutives. La fréquence des autres complications (accidents hypovolémiques, risque de fracture…) est très faible. Longtemps évoqué, notamment avec la dapagliflozine, le risque d’amputation au niveau des membres inférieurs n’a pas été confirmé dans des méta-analyses.
BIBLIOGRAPHIE
1. Médicaments du diabète de type 2 : La HAS actualise son évaluation des gliflozines (16 déc. 2020).
2. Perkovic V et al. Canagliflozin and Renal Outcomes in Type 2 Diabetes and Nephropathy N Engl J Med. 2019 Jun 13;380(24):2295-2306.
3. McMurray JJV, DeMets DL, Inzucchi SE, K ber L, Kosiborod MN, Langkilde AM, et al. A trial to evaluate the effect of the sodium–glucose cotransporter 2 inhibitor dapagliflozin on morbidity and mortality in patients with heart failure and reduced left ventricular ejection fraction (DAPAHF). Eur J Heart Fail. mai 2019;21(5):665‑75.
4. Wiviott SD, Raz I, Bonaca MP, Mosenzon O, Kato ET, Cahn A, et al. Declare-
Timi. Dapagliflozin and Cardiovascular Outcomes in Type 2 Diabetes. N Engl J Med. 24 janv 2019;380(4):347‑57.
5. Hiddo J.L. Heerspink et al. Dapagliflozin in Patients with Chronic Kidney Disease. N Engl J Med 2020; 383:1436-1446
6. Zinman B, Inzucchi SE, Lachin JM, Wanner C, Ferrari R, Fitchett D, et al. Rationale, design, and baseline characteristics of a randomized, placebo-controlled cardiovascular outcome trial of empagliflozin (EMPA-REG OUTCOMETM). Cardiovasc Diabetol. 19 juin 2014;13(1):102
7. Milton Packer M et al. EMPEROR-Reduced: Empagliflozin in Heart Failure With a Reduced Ejection Fraction, With and Without Diabetes. Cardiovascular and Renal Outcomes with Empagliflozin in Heart Failure. N Engl J Med 2020; 383:1413-142
Hélène Joubert (rédactrice) avec le Pr Ariane Sultan (service d’endocrinologie-diabétologie-nutrition, CHU Lapeyronie, Montpellier).
Étude et pratique
Complications de FA, l’insuffisance cardiaque plus fréquente que l’AVC
Cas clinique
L’ictus amnésique idiopathique
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