Ni carton rouge, ni chèque en blanc : les étudiants en médecine (ANEMF), internes (ISNI et ISNAR-IMG) et jeunes praticiens (chefs de clinique, SNJMG, ReAGJIR) ont globalement salué le plan santé dévoilé par le président Emmanuel Macron mais en pointant plusieurs points de vigilance ou d'inquiétude.
Mesure phare du plan, la suppression attendue du numerus clausus et de la PACES est applaudie par les carabins. « Ce sont de très bonnes mesures qui mettent fin à un système déshumanisé, se réjouit Clara Bonnavion, présidente de l'ANEMF. Elles permettront un assouplissement dans les études de santé et valoriseront la diversité des profils. » Si le futur système de sélection reste flou, l'ANEMF garde la tête froide. « Il ne faudra pas retomber dans les défauts et les travers de la PACES comme les risques psychosociaux ou l'évaluation sur des critères restreints, souligne sa présidente. Et sur les capacités de formation, nous sommes déjà à saturation dans nombre de facultés, nous avons une qualité pédagogique à assurer, or elle pêche déjà dans les stages. »
Une concertation a été lancée début septembre par les carabins sur la rénovation du premier cycle des études de santé, l'entrée dans les études et les passerelles entre cursus.
Une réforme à l'envers ?
Le Syndicat national des jeunes généralistes (SNJMG) se montre plus réservé sur la logique réformatrice. « Alors que s'est mise en place l'année dernière une réforme (imparfaite) du 3e cycle des études médicales, les ministères ont commencé à annoncer cet été les premières mesures d'une réforme du 2e cycle. Or voici que le plan Santé nous annonce une fin du numerus clausus pour la rentrée 2020 ! Plutôt que de réformer les études dans un ordre logique, le gouvernement assume de s'y prendre totalement à l'envers », ironise le Dr Sayaka Oguchi, présidente du SNJMG. En pratique, le syndicat redoute que les facs de médecine n'aient « ni les moyens ni la volonté » d'assumer les promotions de première année sur tout un cursus. La mise en place d'une « sélection dissimulée, saucissonnée en plusieurs examens étalés dans le temps, sur des critères plus ou moins aléatoires » est une vraie source d'inquiétude. Ce risque de favoriser « le marché des officines privées de préparation parallèle aux études », alerte le SNJMG.
Plus-value médicale, moins de tâches répétitives
La création d'une nouvelle fonction d'assistants médicaux pour épauler les libéraux regroupés est applaudie par les internes. L'Intersyndicale nationale des internes (ISNI) veut croire que cette mesure « sur le modèle des assistants dentaires » permettra de recentrer le médecin sur la plus-value de ses compétences médicales. « On espère que ça sera davantage qu'un aide-soignant de ville, souligne Jean-Baptiste Bonnet, chef de file des internes. Il pourrait réaliser le questionnaire de pré-consultation pour le médecin et avoir un rôle dans la prévention. Ces assistants travailleront sous la responsabilité directe des praticiens pour les décharger des tâches répétitives. »
Filières de prise en charge
Autre mesure qui sied plutôt aux internes : l'incitation à « jouer collectif » (avec des financements priorisés vers les professionnels regroupés). « Avec le regroupement géographique de praticiens au service d'une population, nous avons les prémices d'organisation en filières de prise en charge », analyse l'ISNI.
Le syndicat Jeunes Médecins (ex-ISNCCA, chefs de clinique) plébiscite la réorganisation de l'offre hospitalière (soins de proximité/soins spécialisés/soins ultraspécialisés ou plateaux techniques de pointe) et l'évolution statutaire. « On est en accord avec les trois niveaux de gradation hospitalière et avec le statut unique de PH », juge le Dr Emanuel Loeb, président de la structure jeune. En revanche, le syndicat souhaite rediscuter de l'offre ambulatoire dans le contexte de la multiplication des communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS), ces groupements au cœur de la réorganisation libérale. « Ce n'est pas à l'hôpital d'aller à la ville, mais à la ville d'aller à l'hôpital », résume-t-il.
Les CPTS récoltent les faveurs de l'Intersyndicale nationale autonome représentative des internes de médecine générale (ISNAR-IMG). Les futurs généralistes estiment que le travail interpro est devenu « incontournable ». « Cela semble être le bon niveau d'organisation, explique Maxence Pithon, président de la structure jeune. Ces coopérations permettront d'utiliser au mieux les compétences de chacun au service des patients et de leur parcours de soins. Elles devront également optimiser la réponse aux soins non programmés et la permanence des soins ambulatoires ». En revanche, le syndicat identifie un vrai besoin de formation à « l'interpro » dans les études et lors des stages.
Valoriser ceux qui s'impliquent dans les regroupements
Enfin, le Regroupement autonome des généralistes jeunes installés et remplaçants (ReAGJIR) attend de voir les moyens réels alloués aux CPTS. « Les initiatives doivent venir des territoires mais, sans moyens, ce ne sera pas chose facile car la mise en place de CPTS est lourde et demande beaucoup de travail administratif. Peut-être faudrait-il envisager que l’ARS mette à disposition un temps de secrétariat ou valorise le temps passé à faire fonctionner ces CPTS, propose le Dr Yannick Schmitt, président de ReAGJIR. On pourrait imaginer une rémunération graduelle en fonction du degré d’investissement du médecin dans une pratique pluriprofessionnelle. »
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