Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S : « Sans vision, sans cap et sans capitaine »

Publié le 21/06/2024
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Crédit photo : ROMUALD MEIGNEUX

Le problème quand on signe un contrat, c’est qu’on le signe dans son entièreté. Or, cette convention est un bricolage où on bouche les trous. Ce texte est dangereux, il bloque tout. Je reste persuadé qu’il vaudrait mieux tout démolir pour tout reconstruire plutôt que d’accepter cette convention sans vision, sans cap et sans capitaine.

Le G à 30 euros (rattrapage de l’inflation) est nommé et présenté comme une augmentation tarifaire, et de fait, il n’y aura plus de progression tarifaire pendant cinq ans. Ce rattrapage, sous l’effet de l’inflation, s’annulera durant la période conventionnelle. Rien n’aura été réglé. D’autant que le texte ne contractualise pas d’augmentation tarifaire en cas de nouvelle augmentation autoritaire de la durée. Rappelons que la convention précédente a duré sept ans, par décision politique !

Le principe de la limitation du nombre de consultations complexes pour un même patient est avalisé. La responsabilité du médecin reste, elle, engagée à hauteur de la difficulté de l’acte à chaque fois et, dans la majorité des cas. Il ne sera donc pas rémunéré à hauteur de cette responsabilité. L’accès aux honoraires complémentaires reste inégalitaire. La visite, acte primordial de l'exercice du médecin généraliste, reste non valorisée à hauteur de sa valeur médicale. Le nouveau forfait médecin traitant ne rentrera, lui, en fonction qu’en 2026… Rien dans le texte conventionnel signé par les syndicats ne sacralise comme majoritaire la part du paiement à l’acte au sein des modes de rémunération, celle-ci pourrait donc continuer à baisser et avec elle l’indépendance de l’exercice. Alors que la hiérarchisation des actes garantissait que toute révision de la nomenclature ne pouvait être que gagnante (principe des tarifs cibles), la nouvelle convention fait sauter ce verrou. Il n’y a donc aucune garantie que la valeur des actes ne diminue pas en dessous de sa valeur actuelle lors de la révision de la CCAM qui aura lieu dans deux ans. Les exemples sont nombreux pour montrer que la convention 2024-2029 ne donne pas les moyens de l’indispensable choc d’attractivité.

Le marasme de la médecine libérale perdurera

Ce texte ne sortira pas la médecine libérale du marasme dans lequel elle est enfoncée depuis trop longtemps et ne permettra pas aux Français de voir une amélioration de leur accès au soin. Pire, cette convention est dangereuse en ce qu’elle pérennise la fragilisation des exercices médicaux et ne résout donc en rien la crise dramatique de notre système de santé, en médecine de ville ou à l’hôpital. Elle va pourtant être appliquée…

Dr Jérôme Marty, président de l’UFML-S

Source : Le Quotidien du Médecin