Un œdème de Quincke
Une patiente est adressée à l’allergologue par son médecin traitant. Elle raconte que, deux mois plus tôt, trente minutes après une piqûre d’hyménoptère sur la main, elle a présenté un œdème du bras et une gêne laryngée. Un traitement instauré par le médecin de garde a permis la régression des symptômes.
En reprenant l’interrogatoire, on retrouve la notion d’une piqûre cinq ans auparavant avec une réaction locale. Le bilan allergologique réalisé en milieu hospitalier montre une réaction au venin de guêpe vespula. Le mécanisme incriminé est IgE-dépendant, ce qui explique le caractère souvent rapide dans le délai d’apparition des réactions. Une urticaire ou un œdème local peuvent s’étendre à une ou deux articulations et évoluer vers des formes plus sévères aboutissant au choc anaphylactique. Il est important de les différencier des réactions toxiques observées lors de piqûres multiples (environ une cinquantaine).
Des facteurs influencent la gravité : les réactions observées semblent moins sévères chez l’enfant ; la gravité clinique est plus importante avec l’abeille qu’avec la guêpe et en cas de pathologie cardiovasculaire, de mastocytose préexistante ou de prise de bêtabloquant.
Allergènes majeurs des venins
Selon les familles et les espèces, la composition allergénique du venin peut varier. Il s’agit d’amines vaso-actives dont l’histamine est la plus représentative, de peptides comme la mélélitine, l’apamine et d’enzymes comme la phospholipase A2 et la hyaluronidase. Ces derniers sont considérés comme des allergènes majeurs comme les phospholipases A1 (PLA1) et A2 (PLA2), avec l’antigène 5. La PLA2 est présente chez l’abeille et le bourdon alors que PLA1 et antigène 5 sont présents chez les guêpes et frelons.
Les allergènes recombinants
Le bilan allergologique est une étape essentielle avant la mise en place d’une immunothérapie spécifique. L’interrogatoire permet de spécifier le nombre de piqûres et, si possible, la nature de l’hyménoptère, la chronologie des événements et le type de réaction observée, la présence de facteur de risque. Les tests cutanés en pricks et en intradermoréactions sont effectués en milieu hospitalier au moins un mois après la réaction allergique. Depuis peu, l’allergologie moléculaire avec le dosage d’anticorps spécifiques d’allergènes recombinants de venins représente un aide non négligeable au bilan. Ces examens sont réservés pour l’instant à des praticiens rompus à leur interprétation.
Un traitement efficace : l’immunothérapie
Différents critères régissent l’indication d’une désensibilisation spécifique et le choix du venin utilisé chez les patients ayant présenté une réaction systémique sévère :
- les résultats du bilan en tenant compte également de l’état clinique du patient (grossesse en cours, traitement par bêtabloquant, mastocytose, etc.) ;
- les protocoles sont effectués en milieu hospitalier, sous la forme de rush thérapie avec une progression des doses et des concentrations pendant 3 heures 30 pour atteindre une dose cumulée de 100 µg qui constitue ensuite la dose d’entretien injectée une fois par mois. Ces doses peuvent être augmentées à 200 µg dans certaines circonstances, comme la mastocytose.
Une protection variable selon les espèces
Pour l’abeille, la protection obtenue par immunothérapie spécifique est de l’ordre de 80 %. Elle est de 95 % pour les guêpes poliste et vespula. La désensibilisation dure environ cinq ans, son arrêt étant conditionné par des critères très précis :
- des tests cutanés et dosages d’IgE-spécifique devenus négatifs ;
- l’évaluation de réactions cliniques en cas de nouvelle piqûre durant la désensibilisation ;
- chaque arrêt doit faire l’objet d’une discussion au cas par cas par l’allergologue prescripteur.
Adrénaline auto-injectable
L’adrénaline auto-injectable de type ANAPEN doit ensuite accompagner dans ses déplacements tout patient ayant présenté un choc anaphylactique aux venins d’hyménoptère et ayant bénéficié d’une désensibilisation spécifique. Son maniement et les circonstances d’utilisation sont expliqués par le médecin prescripteur afin d’éviter toute erreur d’utilisation.
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