Quelle place pour le conjoint ?

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Publié le 16/04/2021
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L’idéalisation du conjoint empêche la reconnaissance des difficultés qu’il rencontre. Sa prise en charge lui permet de jouer son rôle d’aidant.
Dans les faits, le soutien infaillible de l’autre ne va pas forcément de soi

Dans les faits, le soutien infaillible de l’autre ne va pas forcément de soi
Crédit photo : phanie

Face à la maladie, le conjoint est perçu comme le premier aidant naturel, pourvoyeur de soutien moral, émotionnel, matériel et même comme support thérapeutique. C’est d’autant plus vrai qu’en raison des mutations majeures du système de soins en oncologie, les patients sont de moins en moins longtemps présents à l’hôpital. Même en l’absence de guérison, l’espérance de survie des malades augmente et les soins palliatifs à domicile se développent. Pour toutes ces raisons, il est fait davantage recours au conjoint, qui est idéalisé. « Pour le malade, idéaliser son partenaire l’aide d’ailleurs à se défendre contre ses angoisses de mort, d’abandon », a insisté Anne Laure Sedda, psychologue et sexologue au Centre Oscar Lambret à Lille.

Mais, dans les faits, le soutien infaillible du conjoint ne va pas forcément de soi. Le cancer marque une rupture de l’équilibre personnel, conjugal, familial. Il peut aggraver les failles, conflits, etc., chez le malade comme chez son ou sa partenaire, et la temporalité propre à chaque individu est susceptible d'aggraver encore la situation, en étant source de décalage et d’incompréhension entre les deux. Le cancer est aussi la maladie de toutes les pertes : peur de perdre l’autre, d’être abandonné, perte de l’illusion d’immortalité, perte de ses repères existentiels, de ses repères corporels, de l’insouciance. Enfin, le partenaire non malade se retrouve à assumer plus de tâches, être plus présent pour les enfants, etc., et peut donc se retrouver en difficultés et en souffrance lui aussi, avec un risque d’épuisement psychique.

« L’idéalisation du conjoint – il se doit d’être idéal ! – empêche la reconnaissance et la prise en charge de ses difficultés et de sa souffrance psychique : elle est donc délétère aussi pour le malade. Autoriser l’expression émotionnelle chez le conjoint, laisser s’exprimer l’ambivalence émotionnelle, redonner sa place à chacun, est donc essentiel », a souligné Anne Laure Sedda.

 

 

 

Exergue : Dans les faits, le soutien infaillible de l’autre ne va pas forcément de soi


Source : Le Quotidien du médecin