Si FAST-MI est avant tout un registre de l’urgence hospitalière, il n’en est pas pour autant dénué d’enseignements pour les praticiens libéraux. L’analyse de l’évolution du délai moyen d’appel des patients ayant une douleur thoracique entre 2005 et 2015 met en évidence une baisse de ce délai de 2005 à 2010, de 90 à 74 minutes, avant qu’il ne revienne à 90 minutes en 2015. Une donnée qui soulève évidemment la question de la qualité de l’information donnée aux patients. Mais ce délai varie fortement selon que le patient avait ou non des antécédents coronaires : il a baissé régulièrement chez les coronariens connus (de 87 min en 2005 à 75 min en 2010 et 60 min en 2015), ce qui témoigne d’une bonne information des patients par leur cardiologue et/ou médecin traitant sur la conduite à tenir en cas de douleur, alors qu’il a tendance à s’allonger chez les sujets sans antécédents coronaires : 100 minutes en 2005, 75 en 2010 et 98 en 2015. « Une détérioration qui pourrait être en lien avec l’arrêt des campagnes grand public sur ce sujet », a estimé le Pr Nicolas Danchin (Paris), avant de rappeler que l’appel directement au 15 ou au 18, et non au médecin traitant ou au cardiologue, est essentiel afin de ne pas retarder la procédure de revascularisation.
Des recommandations insuffisamment suivies
Un autre enseignement porte sur le suivi des recommandations à la sortie de l’hôpital. Dans la vraie vie, l’application des recommandations de la Société européenne de cardiologie a certes progressé au fil du temps, mais n’est toujours pas optimale : elles étaient respectées par 21 % des patients en 2005, 38 % en 2010 et 48 % en 2015, soit par moins d’un patient sur deux. C’est en particulier sur la prescription des inhibiteurs du récepteur P2Y12 et sur celle des hypolipémiants à haute dose que les recommandations sont toujours insuffisamment suivies (respectivement 66 % et 74 % en 2015), alors que les prescriptions de bêtabloquants et des inhibiteurs de l’enzyme de conversion ou des sartans le sont à des niveaux très corrects (92 % et 85 % respectivement en 2015). Si l’on prend l’exemple des statines à forte dose, qui améliorent nettement le pronostic à 1 an, le taux de cholestérol LDL reste l’un des paramètres décisionnels largement pris en compte, alors que les recommandations les préconisent quel que soit le niveau de LDL.
De plus, comme le confirme un travail récent du Dr Étienne Puymirat (Paris) soumis à publication, ce sont les patients les plus à risque qui sont paradoxalement les moins bien traités, alors que c’est justement chez ces sujets à haut risque que le traitement est le plus bénéfique.
Enfin, la durée de traitement n’est pas non plus en phase avec les recommandations. « Certains produits, comme les statines ou les bêtabloquants en cas d’insuffisance cardiaque, doivent être prescrits de façon prolongée, alors qu’il n’y a pas globalement d’intérêt à poursuivre les antiagrégants plaquettaires au-delà d’un an », a rappelé le Pr Danchin.
Des progrès ont donc été réalisés quant à la phase aiguë de l’infarctus du myocarde, mais des efforts restent à faire pour améliorer la prise en charge des patients les plus à risque à la sortie de l’hôpital, et plus généralement celle de tous les patients à plus long terme.
Article suivant
Les canalopathies au premier plan
FAST-MI, un registre toujours riche d’enseignements
Les canalopathies au premier plan
Quelles indications après les résultats de MITRA-FR et COAPT ?
Des évolutions dans l’insuffisance cardiaque sévère
Des causes d’ischémie encore mal connues
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024