En France, pays longtemps épargné par cette maladie dite de société, la prévalence de l’obésité a été multipliée par 2,5 depuis 1997. « Elle est désormais de 18,1 %, avec de fortes disparités socio-économiques et géographiques », souligne la Dr Margot Denis, endocrinologue-nutritionniste au sein du groupe hospitalier Pitié-Salpêtrière à Paris.
L’obésité est une maladie endocrinienne du tissu adipeux qui n’est pas que la conséquence d’un déséquilibre entre les apports et les dépenses, mais d’origine multifactorielle. Les travaux menés ces dernières années plaident en faveur d’une mémoire génétique de l’obésité au niveau du tissu adipeux, avec une hyperexpression des gènes de l’inflammation et de la fibrose. La fibrose du tissu adipeux, qui perd de sa plasticité, est à l’origine de la limitation de la perte de poids. Le poids à un instant T est ainsi plus le reflet de l’histoire de la prise de poids que de la consommation alimentaire à l’instant présent.
De 10 à 30 % des patients ayant une obésité présentent une hyperphagie boulimique, le « binge eating disorder » des Anglo-Saxons, qui ne touche que 1 % de la population générale. Il se traduit par des accès de boulimie compulsive sans sensation de faim et conduisant à une sensation douloureuse et un sentiment de culpabilité, sans modifications comportementales compensatoires.
Une maladie hétérogène
Aujourd’hui, l’hétérogénéité clinique de l’obésité et des risques qui lui sont associés est reconnue, et a fait récemment l’objet de recommandations de la Haute autorité de santé.
À côté de l’indice de masse corporelle, sur lequel se fonde toujours le dépistage, six autres paramètres permettent de définir le phénotype de l’obésité et son stade de sévérité, qui guident le parcours de soins : le retentissement médical (sévérité des comorbidités), le retentissement fonctionnel et sur la qualité de vie, la présence ou non de troubles psychologiques, psychopathologiques et/ou cognitifs, l’étiologie de l’obésité, la présence ou non de troubles du comportement alimentaire, et la trajectoire pondérale.
Ce phénotypage permet de définir le stade de sévérité de l’obésité : stades 1a et 1b (situations non complexes), pris en charge dans le niveau de recours 1, et donc par le médecin traitant en ville, en faisant appel si besoin à d’autres acteurs de santé ; stade 2, pris en charge dans le niveau de recours 2, avec suivi coordonné par un spécialiste en libéral et stades 3a et 3b, pris en charge dans le niveau de recours 3, c’est-à-dire en centre spécialisé de l’obésité.
Les effets délétères de la stigmatisation
Pour les praticiens de première ligne, il est donc important de proposer au patient une mesure du poids, de la taille et de la circonférence abdominale, et de calculer l’IMC. Après évaluation globale du patient, notamment la recherche des comorbidités, l’objectif dans les formes non complexes est de stabiliser le poids, par des mesures comportementales (conseils alimentaires et activité physique adaptée) et non pas par des régimes restrictifs.
« Il est essentiel d’éviter la stigmatisation, qui est un facteur favorisant la prise de poids, car il affecte le bien-être mental et provoque l’hyperphagie », a souligné la Dr Margot Denis.
Dans les formes complexes, l’arrivée des médicaments de l’obésité, qui permettent, au-delà de la baisse de poids, d’améliorer le pronostic cardiovasculaire, est venue changer la donne. Ils ont désormais une place en deuxième intention, notamment chez les patients ayant un IMC ≥ 30 kg/m2, sur prescription par un spécialiste voire, dans certains cas, en association à la chirurgie bariatrique.
Communication de la Dr Margot Denis, groupe PSL, Paris
Article précédent
Le visage des maladies cardiovasculaires en France
Article suivant
Vigie sur l’insuffisance tricuspide
Le visage des maladies cardiovasculaires en France
L’obésité, une maladie complexe
Vigie sur l’insuffisance tricuspide
Sport, nanoplastiques : des facteurs de risque cardiovasculaire émergents
Bénéfices de la fermeture de l’auricule gauche post-ablation
Colchicine, spironolactone : déceptions dans l’infarctus du myocarde
Les SMS des JeSFC 2025
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024