Bien que des études aient mis en évidence une plus faible incidence des cardiopathies ischémiques chez les pratiquants de l’endurance à haute intensité, des essais plus récents retrouvaient chez ces sujets une plus forte présence de plaques d'athérosclérose coronarienne. Pour expliquer ce paradoxe, l’hypothèse était que les plaques calcifiées, plus fréquentes chez les athlètes, étaient plus stables que les plaques mixtes des non-sportifs. Mais, il manquait une comparaison directe entre athlètes d’endurance et personnes avec une activité physique standard.
L’endurance n’immunise pas contre l’athérosclérose
L’étude Master@Heart (1) a donc comparé le score calcique chez des hommes de 50 à 60 ans, sans facteurs de risque cardiovasculaires (CV), dont 191 sportifs ayant pratiqué l’endurance « à vie » (début de l’entraînement avant 30 ans), 191 sujets ayant commencé après 30 ans, et 176 témoins avec une activité physique de moins de trois heures par semaine. Elle comporte néanmoins certains biais, comme le recrutement uniquement masculin et la difficulté d'évaluer la pratique sportive tout au long de la vie.
En moyenne, les sportifs faisaient autour de 10 à 11 heures d’activité physique versus une heure pour les témoins. Ils avaient une consommation maximale d’oxygène (VO2 max) plus élevée et un indice de masse corporelle (IMC) inférieur au groupe contrôle, tout en ayant peu de facteurs de risque CV. Les athlètes de longue date ont dans l’ensemble plus de plaques d’athérosclérose et proximales, y compris celles calcifiées, que le groupe témoin, mais aussi une prévalence plus élevée de plaques sténosées (> 50 %) par rapport à ceux débutant plus tardivement. La répartition entre plaques calcifiées, non calcifiées et mixtes est identique dans les trois groupes, avec une prédominance de plaques calcifiées.
Il existe donc une nette corrélation entre l’intensité de l'exercice et l'athérosclérose coronaire. Cependant, si un score calcique plus élevé augmente le risque CV, il peut être réduit par une meilleure fonction cardiorespiratoire. « On peut retenir que personne n'est immunisé contre l'athérosclérose coronarienne, pas même les athlètes d'endurance, mais la pire chose que vous puissiez faire est de ne rien faire du tout ! », s’exclame le Dr Ruben De Bosscher (Belgique). La relation entre entraînement en endurance et athérosclérose coronaire pourrait être en J inversé, ce qui demande une attention toute particulière chez les personnes s’adonnant à l’endurance de façon très intensive.
L'étude Master@Heart remet ainsi en question le concept selon lequel les sportifs d’endurance auraient des plaques coronaires de composition plus favorable. Cependant, elle ne remet pas en cause les bénéfices de l’activité physique, mais peut alerter sur la pratique de sports d’endurance extrêmes.
Pas de contre-indication en cas de cardiomyopathie hypertrophique
Classiquement, il est conseillé aux personnes atteintes de CMH d’éviter la pratique sportive intensive, voire toute activité physique. L’étude internationale LIVE-HCM (2) est la première à en évaluer les risques potentiels. Elle a recruté 1 534 personnes atteintes de CMH entre 8 et 60 ans, mais aussi 126 individus ayant une variante génétique de la CMH mais sans hypertrophie ventriculaire gauche (HVG).
Globalement, 42 % des participants avaient une activité intensive (course, natation, basket-ball, football) à au moins six Metabolic Equivalent of Task (MET), et 43 % une activité modérée, (marche rapide ou aérobic) entre quatre à six MET, pendant plus de 60 heures par an. Enfin, 16 % étaient considérés comme inactifs.
Les évènements du critère d'évaluation principal (mortalité totale, arrêt cardiaque, arythmie ventriculaire traitée par un défibrillateur automatique implantable, syncope) ont été observés chez 44 personnes à activité modérée et 33 sujets à activité intensive (RR = 1,01, p = 0,98). Il est à noter que ces complications ne sont survenues qu’en cas de CMH, aucune en cas de variante génétique sans HVG. La pratique sportive intensive ne provoque pas plus d’évènements CV graves chez les patients atteints de CMH et pratiquant un sport de façon intensive, que chez ceux à activité modérée ou inactifs. « Nous devons faire évoluer nos manières de penser. À condition que ces patients soient évalués par des cardiologues experts, il n’y a pas de raison de restreindre le sport intensif chez les sujets atteints de CMH », insiste la Dr Rachel Lampert.
(1) De Bosscher R et al, European Heart Journal (2023) 00, 1–12
(2) Rachel J. Lampert, ACC 2023, Abstract 410-08
Article précédent
Prévention cardiovasculaire : une stratégie anticholestérol en pleine évolution
Article suivant
Des progrès dans l’HTAP !
Prévention cardiovasculaire : une stratégie anticholestérol en pleine évolution
Sport intensif et cœur : des remises en question
Des progrès dans l’HTAP !
Troponine et prééclampsie
Bénéfice de la thrombectomie percutanée
Valvulopathies : toujours plus d’interventions percutanées
Comment revasculariser ?
Stents de dernière génération
La stimulation auriculaire inefficace
SMS du congrès ACC
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?