En cas de pancréatite aiguë biliaire légère, les recommandations internationales préconisent une cholécystectomie au cours de l’hospitalisation, le risque d’événements biliaires à distance (migration, cholécystite, angiocholite ou récidive de pancréatite) n’étant pas négligeable. En cas de forme sévère, l’inflammation locale oblige à différer l’intervention ; un temps pendant lequel le lien entre réalimentation et risque de récidive biliaire reste débattu. En effet, s’alimenter par voie orale pourrait entraîner des contractions vésiculaires, avec un risque théorique d’événement biliaire. « Faute de données solides, les pratiques varient d’un centre à l’autre, signale le Dr Frédérick Moryoussef (CHI de Poissy-Saint-Germain-en-Laye), investigateur principal de la cohorte des pancréatites aiguës biliaires légères à sévères (Capables). Certains maintiennent les patients à jeun jusqu’à l’intervention, d’autres autorisent une reprise alimentaire, ou encore privilégient une nutrition entérale par sonde. Quant aux recommandations européennes (Espen 2024), elles préconisent une alimentation orale excluant les graisses jusqu’à la cholécystectomie en cas de pancréatite aiguë légère à modérée, mais ne citent pas d’études robustes dédiées à l’étiologie biliaire. »
Voie orale, entérale ou jeûne
Initiée par l’Association nationale des gastroentérologues des hôpitaux généraux (ANGH) et soutenue par la Société française nationale de gastroentérologie (SNFGE), l’étude observationnelle Capables a cherché à analyser l’incidence des événements biliaires, avant la réalisation de la cholécystectomie, chez les patients atteints de pancréatite aiguë biliaire, en fonction du mode d’alimentation adopté, oral ou entéral. Ainsi, entre octobre 2022 et décembre 2023, 1 172 patients ont été inclus de manière prospective dans 60 établissements hospitaliers français (40 CHG et 20 CHU). Parmi les 1 169 patients évalués à la fin de leur hospitalisation, 849 présentaient une pancréatite aiguë légère à modérée et 316 une forme sévère.
Parmi les premiers, au-delà de 48 à 72 heures, 572 ont repris une alimentation orale, 83 ont bénéficié d’une nutrition entérale et 194 ont été maintenus à jeun jusqu’à la cholécystectomie ; ils étaient 152, 109 et 57, respectivement, parmi les formes sévères.
238 événements biliaires ont été recensés chez 188 patients (angiocholites : 10,5 % ; pancréatites aiguës : 32 % ; cholécystites aiguës : 7,6 % ; enclavement biliaire : 10,5 % ; colique hépatique ou migration lithiasique 40 %).
« Sous réserve d’avoir interprété la totalité des événements biliaires, précise le Dr Moryoussef, la comparaison des différentes modalités d’alimentation n’a pas révélé de différence, sans observer de rôle protecteur d’un certain type d’alimentation sur la récidive biliaire. L’effectif de la cohorte était soit insuffisant pour mettre en évidence une différence, soit celle-ci n’existait pas. »
« En pratique clinique, on peut donc s’aligner sur les recommandations, c’est-à-dire l’alimentation orale pauvre en graisses en cas de forme légère à modérée. Pour les formes sévères avec cholécystectomie différée, l’alimentation entérale initiale sera proposée à visée nutritionnelle (catabolisme majeur, douleurs), sans arguments en faveur d’une protection vis-à-vis d’événements biliaires, souligne le spécialiste. Seuls un tiers des patients avec pancréatite aiguë biliaire légère ont été opérés lors de l’hospitalisation initiale. 67 % n’ont pas bénéficié d’une cholécystectomie immédiate préconisée par les recommandations, dont 45 % pour des raisons organisationnelles. »
Article précédent
Les effluents, angles morts de la transition
Article suivant
Le TNCD : une expertise unique en cancérologie digestive
Mici : la piste des pratiques agricoles
Les effluents, angles morts de la transition
L’alimentation avant cholécystectomie
Le TNCD : une expertise unique en cancérologie digestive
L’ostéopathie n’a aucun intérêt dans le syndrome de l’intestin irritable
Des effets (pas si) indésirables
Transplantation : des données à sept ans sur l’alcool
Les SMS du congrès JFHOD 2025
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024