Les pertes de grossesse précoce (ou fausses couches spontanées avant 14 semaines d’aménorrhée) concernent 15 % des grossesses, soit environ 200 000 cas par an en France. Face à cette situation fréquente, dont l’impact psychosocial peut être important pour la femme comme pour son entourage, la loi du 7 juillet 2023 visant à favoriser l’accompagnement des femmes, en proposant un parcours de soins spécifique, constitue une réelle avancée. Toutes les mesures prévues dans les différents articles ne sont pas encore appliquées, c’est par exemple le cas du suivi psychologique adapté, qui doit être mis en place par chaque agence régionale de santé (ARS), ou du droit au télétravail au moins deux jours par semaine dès le début de la grossesse. En revanche, l’arrêt de travail spécifique de trois jours est d’ores et déjà une réalité sur le terrain, tout comme la possibilité de rester à l’hôpital pour les femmes qui le souhaitent.
200 000
C’est le nombre annuel de cas en France
Ajouter systématiquement la mifépristone au misoprostol
« La prise en charge médicale a elle aussi évolué, avec l’ajout de la mifépristone au misoprostol, désormais pratiqué dans de nombreuses maternités mais malheureusement pas toutes », regrette le Pr Guillaume Legendre (CHU d’Angers). Cette association, recommandée à la suite des résultats de deux essais randomisés, publiés dans le New England Journal of Medicine en 2018 et dans le Lancet en 2020, permet d’augmenter le taux d’évacuation. La mifépristone agit en antagonisant les effets endométriaux et myométriaux de la progestérone et en potentialisant l’action des prostaglandines, ce qui permet une ouverture du col plus favorable. Son utilisation se fait dans le cadre de la prescription compassionnelle, selon un protocole bien établi : 200 ou 600 mg de mifépristone en une prise par voie orale puis, de 6 à 24 heures après, deux prises de 400 µg de misoprostol, espacées de 4 heures.
En l’absence d’expulsion dans les 24 heures suivant la prise de misoprostol, il est possible de renouveler son administration, en deux prises de 400 µg espacées de 4 heures.
Autre nouveauté : l’actualisation des recommandations du CNGOF qui, depuis 2024, ne préconise plus la prévention de l’allo-immunisation chez les femmes rhésus négatif en cas de menace de fausse couche, ou de fausse couche avérée avant 12 semaines d’aménorrhée. Cette prévention ne concerne donc aujourd’hui que les grossesses extra-utérines. En revanche, l’injection d’immunoglobulines anti-D reste d’actualité à 28 semaines, pour couvrir la fin de la grossesse et le post-accouchement.
Choix entre traitement médical ou aspiration
Dans un contexte de grossesse arrêtée sans critère d’urgence (forme hyperalgique ou hémorragique notamment), c’est à la femme de choisir entre prise en charge médicale ou chirurgicale.
Le traitement chirurgical peut se faire au bloc classique sous anesthésie générale, ou hors bloc sous anesthésie locale (bloc paracervical), avec une surveillance plus limitée au décours. En cas de prise en charge chirurgicale, la prévention primaire des synéchies, qui peuvent grever la fertilité, est essentielle. Il ne faut plus utiliser de curette mais réaliser une aspiration en contrôlant la vacuité utérine par échographie.
Après deux fausses couches prises en charge chirurgicalement, le recours aux barrières anti-adhérentielles (gel à base d’acide hyaluronique) permet de diviser par deux le risque de synéchies et de multiplier par deux le taux de grossesse. Ce type de prévention est aujourd’hui encore peu diffusé en France.
Entretien avec le Pr Guillaume Legendre (Angers)
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