En prévoyant un seuil de rémunération fixe et variable pouvant atteindre 45 % du salaire, ces nouveaux contrats de « cliniciens » conduisent à une petite révolution au sein de l’hôpital. Les syndicats de médecins redoutent leur généralisation exigeant une stricte limitation des recrutements aux besoins les plus criants. Seul problème, les médecins semblent pour l’heure de moins en moins peser dans les décisions hospitalières.
Bernard Granger affirme d’ailleurs que « l’influence des médecins est désormais quasi nulle, y compris pour les recrutements médicaux ». La question de la pose des pacemakers, soulevée récemment en cardiologie à Bichat, ui permet d’en faire une rapide démonstration. Jugée peu rentable au temps du budget global, l’AP-HP a délaissé cette activité, mais aujourd’hui avec la T2A, ces activités sont lucratives.
« Seul problème, nous ne disposons plus des PH pour le réaliser. Alors, l’AP-HP cherche à embaucher des praticiens sur ces nouveaux contrats. Malgré la forte opposition de la communauté médicale, la CME ayant voté contre en février dernier, l’administration et l’ARS ont tout de même accepté ces contrats. J’estime que la CME n’a finalement aujourd’hui aucun pouvoir. » Un sombre diagnostic partagé par Bruno Devergie, président du syndicat des praticiens des hôpitaux publics (SPHP) qui assimile le rôle du président de CME à celui d’un porte-serviette ! « Des praticiens caporalisés sont désormais exclus de la gestion de leurs équipes, la rémunération des PH va bientôt dépendre du bon vouloir du directeur pour lui permettre de disposer enfin de docteurs zélés », déplore-t-il.
L’attractivité des médecins et l’organisation des carrières hospitalières demeurent encore aujourd’hui le cœur du problème. « Nous avons du mal à recruter notamment en anesthésie et en radiologie, deux spécialités dans lesquelles l’AP-HP manque désormais de médecins. À cette pénurie s’ajoute la multiplication des cas de démission de praticiens hospitaliers et de professeurs qui me semblent un très mauvais indicateur », renchérit Bernard Granger. Il lui semble temps de trouver un équilibre dans l’exercice du pouvoir l’hôpital en commençant par limiter les réunions avec l’administration. « Un temps précieux consommé inutilement qui serait mieux employé à dispenser des soins. Laissons aux équipes soignantes le soin d’organiser leur travail. Elles sont les mieux placées pour connaître ce qui est efficient et utile pour chaque malade », soupire-t-il.
Longtemps restée le combat des médecins à diplômes étrangers venus exercer dans les hôpitaux français, la multiplication des statuts concerne désormais l’ensemble des praticiens. Elle inquiète fortement la communauté médicale. Au compte-gouttes, pour gérer et organiser des situations particulières, les praticiens à diplômes hors Union européenne (PADHUE) ont été les premiers à s’adapter ici ou là aux situations et politiques locales pour exercer. Simone Veil leur a la première, en 1994, ouvert la brèche d’un statut sur mesure.
Aux « praticiens adjoints contractuels » (PAC), Bernard Kouchner tendra ensuite une passerelle pour leur permettre de basculer vers le statut de PH. Des recrutements qui cesseront en 2002. Quatre ans plus tard, Xavier Bertrand mettra sur pied une procédure d’autorisation d’exercice (PAE) pour aménager et régulariser la situation de médecins étrangers en exercice dans nos hôpitaux publics. « Ces PAE était une belle idée », selon le Dr Jamil Amhis, président de la Fédération des praticiens de santé (FPS), qui souhaite voir disparaître tous les statuts précaires d’exercice en France.
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