La préretraite des médecins libéraux conventionnés dès 57 ans, c'est fini ! Bien sûr, ceux qui bénéficient déjà du mécanisme de cessation anticipée d'activité (MICA) continueront de percevoir leur allocation jusqu'à leur retraite, soit au plus tard jusqu'en 2011, pour les plus jeunes d'entre eux. En revanche, après le 1er octobre, les médecins libéraux toujours en activité n'auront plus la possibilité de prendre leur préretraite, sauf cas particuliers prévus par le décret du 1er août 2003 (voir encadré).
En abrégeant de quinze mois la vie du MICA, qui devait s'éteindre normalement au 31 décembre 2004, la loi de financement de la Sécurité sociale pour 2003 a bousculé les plans de nombreux praticiens depuis plusieurs mois. Tant et si bien que le MICA moribond a connu un succès fou : la Caisse autonome de retraite des médecins de France (CARMF) ne recense pas moins de 1 131 départs en préretraite depuis le 1er janvier 2003. A titre de comparaison, la caisse en comptait trois ou quatre fois moins les années précédentes, avec seulement 339 entrées dans le dispositif en 2002 et 264 en 2001.
Et encore, les candidats à la préretraite étaient en réalité encore plus nombreux, puisque certains médecins n'ont pu dévisser leur plaque, faute de pouvoir remplir toutes les conditions requises. C'est le cas par exemple du Dr Jean-Paul Josserand, généraliste à Neuville-sur-Saône (Rhône), qui fêtera ses 57 ans au de début 2004 et regrette amèrement de ne pas bénéficier du MICA « à trois mois près ». « Tout ce que j'avais prévu depuis cinq ans s'est effondré », déclare cette « victime » de la loi-couperet du 20 décembre 2002. Las d'exercer en cabinet, le Dr Josserand précise qu'il « se retirera quand même en 2004 sans les avantages du MICA ».
Quant aux plus chanceux qui ont pu solliciter leur allocation de préretraite avant la fermeture du MICA, ils auraient souvent préféré de meilleures conditions de départ. A Rezé (Loire-Atlantique), le Dr Robert Lamotte était « débordé » jusqu'à hier, date de son dernier jour de travail au cabinet. Un autre médecin généraliste, le Dr Jacques Beck, installé à Ogeviller (Meurthe-et-Moselle), annonçait en début de semaine qu'il serait obligé d' « être actif jusqu'au 30 septembre à minuit ». « C'est infernal, je n'ai pas réussi à trouver un successeur alors que je suis prêt à tout donner si un jeune voulait reprendre mon cabinet », raconte le Dr Beck.
Malgré sa courte vie (quinze ans à peine), le dispositif du MICA a connu beaucoup d'aléas, a failli mourir plus d'une fois avant d'obtenir plusieurs sursis. Le MICA a été conçu en 1988 comme une sorte de « prime à l'arrachage », dans un contexte où l'on pensait qu'une offre de soins abondante engendrait mécaniquement une demande équivalente et, partant, des dépenses de santé excessives pour l'assurance-maladie. Financé aux deux tiers par les caisses d'assurance-maladie et par les cotisations des médecins libéraux, le dispositif permettait aux médecins conventionnés de cesser leur activité avant 65 ans tout en bénéficiant d'une allocation de remplacement de revenu et en continuant à acquérir des droits pour leur retraite. Dans les années suivantes, les pouvoirs publics ont rendu la préretraite encore plus incitative (possibilité de cumul avec une retraite hors CARMF dans la limite d'un plafond, avec une activité salariée limitée, abaissement de l'âge minimal d'accès de 60 ans à 56, puis 57 ans...). A deux reprises, en 1992 et en 1994, le régime de la préretraite est prorogé pour deux ans. Après le plan Juppé, le MICA aux conditions assouplies connaît son heure de gloire puisqu'il arrive à séduire 1 263 médecins en 1997, puis 1 429 l'année suivante.
Ensuite, le vent tourne pour lui. Contesté en 1999 par le rapport annuel de la Cour des comptes sur le financement de la Sécurité sociale, le MICA est aussi remis en cause par les dirigeants de la Caisse nationale d'assurance-maladie (CNAM) et l'ex-ministre de l'Emploi et de la Solidarité, Martine Aubry. Jugé coûteux et quasi inopérant sur l'inégale répartition du corps médical par spécialités et sur le plan géographique, le dispositif est prolongé jusqu'au 31 décembre 2004. Mais on l'a modifié en 2000 pour en restreindre l'accès (abaissement du plafond de l'allocation pour les moins de 60 ans).
Enfin, il y a un an, le ministre de la Santé, Jean-François Mattei, a décidé de liquider avant l'heure ce régime qui aura profité à environ 10 500 médecins libéraux, dont une majorité de généralistes et de praticiens de secteur I.
Dérogations pour certains médecins
A titre dérogatoire, certains médecins pourront cesser leur activité après le 1er octobre 2003 et bénéficier quand même du MICA. Il s'agit d'une part des médecins qui cesseront leur activité libérale d'ici au 31 décembre 2004 et qui sont en mesure de prouver qu'ils avaient pris leurs dispositions pour organiser leur départ avant le 1er octobre 2002 (sur présentation de contrats de vente, contrats de location avec une date limite, contrat de présentation de clientèle...).
D'autre part, un sursis est donné aux médecins qui fêteront leur soixantième anniversaire entre le 1er octobre et le 31 décembre 2003. Ceux-ci ont le droit en effet de repousser la date de fermeture définitive de leur cabinet le jour de leurs 60 ans au plus tard, afin de pouvoir bénéficier du plafond maximal de l'allocation (31 700 euros par an, contre 16 162 euros pour les moins de 60 ans).
Article précédent
Les rangs des cumulards s’épaississent au galop
Article suivant
La CARMF en appelle au sommet de l’État
Coup de booster en vue pour le cumul emploi-retraite
Les rangs des cumulards s’épaississent au galop
MICA : une mort en pleine gloire
La CARMF en appelle au sommet de l’État
Pause exceptionnelle de votre newsletter
En cuisine avec le Dr Dominique Dupagne
[VIDÉO] Recette d'été : la chakchouka
Florie Sullerot, présidente de l’Isnar-IMG : « Il y a encore beaucoup de zones de flou dans cette maquette de médecine générale »
Covid : un autre virus et la génétique pourraient expliquer des différences immunitaires, selon une étude publiée dans Nature