Des pruricepteurs ont été mis en évidence, ainsi qu’un certain nombre de molécules qui agissent comme signaux sur l’organisme. Par ailleurs, les voies de conduction du prurit après activation de ces structures et de ces molécules ont été en grande partie élucidées. Enfin, de nouvelles possibilités thérapeutiques sont envisageables. La prise en charge du prurit est toutefois complexe et nécessite de faire appel à des centres spécialisés (1).
L’épidémiologie, les étiologies et les aspects cliniques de ce symptôme fréquent en médecine ont été précisés par une équipe d'experts européens issus de différentes disciplines dans le cadre d’une mise à jour des recommandations qui avaient été publiées en 2012 puis actualisées en 2014 (2).
Une sensation différente de la douleur
Le prurit, cette sensation déplaisante qui provoque le besoin de se gratter, n’est pas une douleur a minima, à laquelle il s’oppose sur bien des points. Ainsi, par exemple, le prurit se caractérise par une réponse motrice spécifique, alors que la douleur se manifeste par un retrait ou une immobilisation. La chaleur exacerbe le prurit, mais soulage la douleur, et c’est l’inverse pour le froid. Les antalgiques soulagent la douleur mais sont sans effet sur le prurit, voire l’exacerbent dans le cas des morphiniques… Bien entendu, des sensations intermédiaires entre le prurit et la douleur existent, comme les paresthésies, à type de picotements, de brûlures, de fourmillements, de tiraillement notamment.
Sur le plan épidémiologique, une personne sur cinq dans la population générale souffre ou a souffert de prurit chronique au moins une fois dans sa vie. L’incidence en est de 7 % sur 12 mois. La fréquence du prurit est beaucoup plus élevée dans certaines populations de patients, en fonction de la cause sous-jacente, et varie de 25 % chez les hémodialysés à 100 % en cas de maladie cutanée comme l'urticaire ou la dermatite atopique.
Une multitude de causes
Sur le plan des étiologies, le prurit peut être consécutif à une maladie dermatologique ou non. En cas de peau non malade, parmi les principales causes, les maladies systémiques sont nombreuses. Il peut s’agir de pathologies rénales à un stade avancé, de la cholestase, de maladies endocrines ou métaboliques (diabète, dysthyroïdies), infectieuses (gale, VIH, hépatite C, toxocarose…), hématologiques et de tumeurs.
Les affections neurologiques et psychiatriques peuvent également être en cause, ainsi que les effets secondaires de certains médicaments. Enfin, le prurit chronique peut être multifactoriel. Dans tous les cas, un bilan diagnostique précis s’impose.
Différents médiateurs en jeu
Sur le plan physiopathologique, l’histamine est loin d’être le seul médiateur impliqué dans le prurit. De nombreuses molécules peuvent être impliquées, comme des protéases, des médiateurs lipidiques ou des cytokines, ainsi que le récepteur D couplé à la protéine G lié au Mas (MRGPRD) [3].
Ainsi, le prurit, cette sensation si fréquente mais dont le retentissement sur la qualité de vie peut être important, est enfin devenu ses dernières années un thème de recherche majeur. Ses mécanismes s’éclaircissent, ce qui ouvre la voie à de nouvelles possibilités thérapeutiques.
D'après la communication du Pr Laurent Misery (Brest)
(1) Misery L Bull Acad Natle Méd 2015;199:979-86.
(2) Weisshaar E et al. Acta Derm Venereol 2019;99:469-506.
(3) Akiyama T et al. Neuroscience 2013;250:697-714.
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