Pourquoi ces médecins se sont-ils engagés dans l’hôpital public ? Quelles sont les valeurs centrales à leur engagement ? Quels sont les motifs de leur désaffection ? Autant de questions auxquelles a voulu répondre l’Espace de réflexion éthique Bourgogne Franche-Comté. Le service public régional adossé aux CHU de Dijon et de Besançon a mené une étude auprès des médecins en activité au sein d’un des deux établissements mais aussi auprès de ceux qui ont pensé à se désengager, voire qui se sont même désengagés ou étant en disponibilité. Au total 17 praticiens ont participé à l’étude.
La majorité des répondants ont indiqué s’être tournés vers une carrière de médecin par envie d’« aider les autres ». Les valeurs fortes d’équité, de justice et de solidarité auraient motivé l’exercice au sein de l’hôpital public. « Mais, actuellement, travailler en adéquation avec leurs valeurs semblent être compliqué », souligne l’étude. Avant de pointer : « De nombreuses réformes ont marqué le début des années 2000, comme la tarification à l’activité (T2A) et le concept d’hôpital-entreprise avec la modification de la gouvernance hospitalière ».
Des craintes sur la manière d’exercer
Le constat est sévère : « avec la recherche de l’efficience, la pratique de la T2A a été orientée dans le but de maximiser les recettes. Et c’est en cela que les médecins la dénoncent. Le travail à l’hôpital incite au devoir de rentabilité, mais ce devoir va à l’encontre des valeurs des médecins hospitaliers, qui se sont justement tournés vers le service public pour pouvoir soigner les gens sans compter ». À cela s’ajoutent les difficultés liées au manque de personnels, aux fermetures de lits, réductions de budget… « Ces conditions de travail ont une conséquence directe sur les professionnels de santé : la peur de devenir maltraitants envers leurs patients. Tout cela a une incidence sur la santé à la fois physique et psychique des médecins », alerte l’Espace de réflexion éthique Bourgogne Franche-Comté.
Parmi les axes d’amélioration, l’étude suggère d’abord « d’augmenter significativement l’Ondam », soulignant que « quelqu'un qui sera en bonne santé va pouvoir travailler et va pouvoir contribuer à la production de la France ». L’étude cite également l’évolution vers un système de dotation populationnelle. Enfin, elle invite à revoir la gouvernance autour du concept « d’hôpital magnétique », dans lequel « la direction alloue seulement une somme au niveau des services. Aussi, les tâches administratives sont déléguées à des personnes qui sont plus « compétentes » afin que les professionnels de santé se concentrent sur l’activité clinique. Cela permet de fidéliser les professionnels de santé et de rendre un peu plus attractif le travail ».
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