La mise à jour des recommandations conjointes de l’ESC et de l’EAS (Société européenne d’athérosclérose) sur la gestion des dyslipidémies (1), qui dataient de 2019, met toujours l’accent sur l’utilisation des algorithmes de prédiction du risque cardiovasculaire chez les sujets indemnes de maladies cardiovasculaire connue : Score2 (chez les personnes de moins de 70 ans) et Score2-OP (à partir de 70 ans). L’une des évolutions, pour affiner la stratification du risque, est la prise en compte des modificateurs du risque, tels que la présence d’une athérosclérose coronaire subclinique mise en évidence en imagerie ou par un score calcique augmenté, chez les patients à risque modéré et ceux à la limite des seuils d’intervention.
Au-delà de ces données de l’imagerie, ces nouvelles recommandations rappellent la longue liste des modificateurs du risque d’événements cardiovasculaires (RCV) à dix ans, allant des antécédents familiaux de maladies cardiovasculaires précoces, aux troubles tensionnels au cours de la grossesse, en passant par la déprivation sociale, le stress ou encore la sédentarité.
Risque « extrême »
Les recommandations rappellent que les valeurs cibles de LDL-cholestérol sont de moins de 116 mg/dL pour les sujets à faible risque (Score2/Score2OP < 1 %), de moins de 100 mg/dL pour ceux à risque modéré, de moins de 70 mg/dL pour ceux à risque élevé, de moins de 55 mg/dL en cas de très haut risque et de moins de 40 mg/dL pour les patients à risque extrême, nouvelle catégorie de risque qui englobe les patients ayant une maladie cardiovasculaire (MCV) et qui sont victimes d’événements vasculaires récurrents, malgré un traitement par statine à la dose maximale tolérée, et ceux ayant une atteinte clinique polyvasculaire, coronaropathie et maladie artérielle périphérique par exemple.
À côté des statines seules, ces recommandations encouragent le recours à des associations de traitements si besoin. C’est notamment le cas des patients à haut risque ou très haut risque qui ne sont pas à l’objectif, chez lesquels l’ajout, à la dose maximale tolérée de statine, d’acide bempédoïque, doit être envisagé. Ce dernier est aussi recommandé chez les sujets ne pouvant recevoir de statines. La recommandation propose un tableau récapitulant la baisse attendue du LDL-c avec les différents traitements pharmacologiques.
Les options thérapeutiques se sont diversifiées, au-delà des statines
Lp(a) et hypertriglycéridémie
La mise à jour des recommandations met en avant le lien entre les taux de Lp(a) et le risque d’événements cardiovasculaires majeurs au cours de la vie. Un taux supérieur à 50 mg/dL doit ainsi être considéré chez tous les adultes comme un facteur augmentant le RCV.
En cas d’hypertriglycéridémie (de 135 à 499 mg/dL à jeun), des doses élevées (2 x 2 g/jour) d’icosapent éthyl (un ester éthylique stable de l’acide gras oméga-3 acide eicosapentaénoïque) sont à discuter, en association à une statine chez les sujets à risque élevé ou très élevé.
Chez les patients ayant une hypertriglycéridémie sévère (> 750 mg/dL) due à un syndrome de chylomicronémie familiale, le volanesorsen (300 mg/semaine) doit être discuté afin d’abaisser les taux de triglycéridémie et réduire le risque de pancréatite.
VIH et chimiothérapies
Les experts préconisent également l’utilisation de statines en prévention primaire chez tous les patients infectés par le VIH âgés de 40 ans et plus, indépendamment de leur niveau de risque cardiovasculaire. Une nouveauté qui fait suite aux résultats du vaste essai randomisé en double aveugle Reprieve, qui a montré une réduction significative des maladies cardiovasculaires chez les patients ayant reçu une statine au terme de cinq ans de suivi.
De même, un traitement par statines doit être considéré chez les patients traités pour un cancer par une chimiothérapie à haut et très haut risque de toxicité cardiovasculaire (anthracyclines notamment).
Enfin, le panel d’experts souligne qu’aucun complément alimentaire ou vitamine n’a fait la preuve de son efficacité sur le risque cardiovasculaire ni de sa sécurité d’emploi, et qu’ils ne sont donc pas recommandés dans ce contexte.
Pour mémoire, la levure de riz rouge, à des dosages de 3 mg ou plus de monacolines par gélule, a été interdite en juin 2022 par l’Union européenne.
(1) Mach F et al. European Heart Journal 2025;ehaf190
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