ACTUELLEMENT À L’ÉTUDE, « de nouvelles recommandations de prise en charge des escarres devraient paraître fin 2012 » a indiqué le Dr Brigitte Barrois (Gonesse). Elles n’avaient pas été mises à jour depuis 2001. Il s’agira d’un consensus d’experts*, à partir d’une analyse bibliographique, d’avis d’experts et d’une analyse des pratiques des professionnels. En effet, prévient le Dr Brigitte Barrois, « il n’est pas possible de faire des recommandations uniquement basées sur la bibliographie car il est très difficile de faire des études dans les plaies chroniques et il y a donc un besoin de modulation par la pratique ».
Le consensus s’articule autour de quatre grandes questions : les facteurs de risque prédictifs d’escarre, puis, en prévention et comme traitement, les supports ou accessoires, les médicaments ou dispositifs et, enfin, l’éducation thérapeutique. Les premières conclusions qui s’en dégagent ont été présentées au congrès par ce groupe.
Les facteurs de risque prédictifs.
Il y a peu de changements par rapport aux facteurs de risque identifiés en 2001. Si l’on se réfère à l’analyse de la littérature, l’immobilité doit toujours être considérée comme un facteur de risque prédictif d’escarre (grade B). La dénutrition est possiblement un facteur de risque (grade C)… Sur ce point, même si le niveau de preuve est faible, la prise en charge est indispensable.
Les échelles de risque sont à utiliser (l’échelle de Braden reste la plus pertinente). « Elles constituent une aide à la décision mais doivent toujours être pondérées par le jugement clinique de l’équipe soignante » a souligné S. Willebois (Limoges). L’évaluation du risque d’escarres et sa prise en charge doivent se faire dès l’admission.
Support et/ou accessoire.
Que ce soit en prévention ou en cas de présence d’escarre, les données de la littérature, rapportées par le Dr J.-M. Rochet (Boisisse-le-Roi) montrent qu’un matelas en mousse est supérieur à un matelas standard (grade A) ; qu’un matelas à air alterné réduit l’incidence des escarres talonnières par rapport à un support viscoélastique… Mais que les escarres qui surviennent dans ce cas sont plus sévères (grade A). Toujours sur les escarres talonnières : un lit à perte d’air est plus efficace qu’un matelas à air pulsé mixte (grade A).
En per et postopératoire, l’utilisation d’un surmatelas sur une table d’opération réduit l’incidence des escarres (grade A). Enfin, la peau de mouton réduit l’incidence des escarres sacrées des patients orthopédiques avec faible risque d’escarre (grade A).
Médicament et/ou dispositif.
En prévention de l’escarre, peu d’études contrôlées randomisées ont été réalisées pour évaluer les traitements pharmacologiques et les dispositifs médicaux. Leur effectif est réduit, les indicateurs de mesure utilisés, subjectifs. De ce fait, deux recommandations de grade C sont émises. Réaliser des soins de nursing, c’est-à-dire utiliser pour le lavage des produits doux, non irritants, hydrater la peau avec des émollients, et protéger les peaux fragilisées par l’incontinence, en utilisant un protecteur cutané. Après cela, on peut aussi réduire des forces de cisaillement, en appliquant des pansements en regard des proéminences osseuses.
Quant à la détersion d’une escarre constituée, le problème du niveau de preuve est le même. « Il y a très peu d’études randomisées contrôlées concernant la phase de détersion » indique Chloé Trial (Montpellier). De fait, les recommandations actuelles semblent surtout issues de l’expérience clinique des praticiens, médecins et infirmiers. Les auteurs notent ainsi qu’il est important que la recherche infirmière appuie et complète la recherche clinique médicale.
Étape suivante, pour assurer le bourgeonnement et la réépidermisation d’une escarre constituée, seuls les hydrocolloïdes ont montré leur efficacité et une recommandation de grade B sera émise. Pour les autres dispositifs, pansements modernes et le VAC, les études contrôlées randomisées manquent.
Dans le cas où l’escarre s’infecte, les experts rappellent que le diagnostic doit être avant tout clinique. Les prélèvements par écouvillonnage ne sont qu’un support, avec des informations partielles. Comme dans d’autres domaines, la technique de prélèvement (après nettoyage de la plaie) et les informations cliniques qui l’accompagnent garantissent la qualité des résultats. Le traitement local (antibactérien) peut être envisagé en présence de signes locaux d’infection (grade C). Le traitement systémique (antibiotique) doit être mis en place en présence de signes généraux d’infection (grade B).
Éducation thérapeutique.
L’éducation thérapeutique a un intérêt dans la prise en charge ou la prévention de l’escarre chez les personnes à risque chronique : sujets âgés (grade C) et personne lésée médullaire (grade B). Réalisée en groupe ou en séances individuelles, elle nécessite une adaptation aux besoins de l’individu et un suivi motivationnel.
*Experts des Société française de gériatrie et gérontologie, Société française de médecine physique et de réadaptation et Société française et francophone des plaies et cicatrisation, réunis à l’initiative de l’Association PERSE (Prévention, éducation, recherche, soins, escarre).
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