La cognition sociale renvoie aux aptitudes et expériences émotionnelles et sociales régulant les relations entre les individus. Elle désigne la capacité de chaque être humain à donner un sens aux actions, paroles et attitudes de l'autre. Elle implique l'acquisition de savoirs sociaux, la perception et le traitement des signaux sociaux ainsi que la représentation des états mentaux d'autrui. « La lecture fine de l'intention de l'autre à travers son langage, son comportement et sa manière d'être est une des principales composantes de la cognition sociale. Ce sont les compétences acquises par chacun dans ce domaine qui permettent, par exemple, d'ajuster son comportement et/ou sa réponse en fonction de la réponse de l'autre », souligne la Pr Sophie Jacquin-Courtois, (hôpital Henry Gabrielle, Hospices Civils de Lyon).
Ces compétences liées aux interactions sociales et à la régulation des émotions sont utiles à l'homme, au quotidien. Or, chez un patient porteur de lésions cérébrales, quelle que soit son étiologie, les aspects socio-émotionnels peuvent être altérés. Ces troubles peuvent se manifester de façon très diverse : difficultés à prendre une décision, à percevoir une émotion, à comprendre les émotions ressenties par les autres, à ajuster son comportement ...
Des outils diagnostic éprouvés
L'intérêt des neuropsychologues pour la cognition sociale est récent : jusqu'au début des années 2000, l’évaluation neuropsychologique concernait principalement la prise en charge des problèmes de langage, de mémoire ou de praxie. « La neuropsychologie socio-émotionnelle est désormais bien documentée dans la prise en charge des patients cérébro-lésés », indique la Pr Jacquin-Courtois. Le diagnostic de ces troubles repose, d'abord, sur la présentation clinique du patient (interrogatoire). Il existe également plusieurs tests spécifiques proposés en fonction de la symptomatologie. « Un des tests le plus utilisé est celui de la reconnaissance des émotions faciales. Le sujet doit rattacher une photographie à une émotion, le plus souvent présentée au sein d’une liste », note la Pr Jacquin-Courtois. D'autres outils plus récents, plus dynamiques (vidéo, jeux de rôle…) sont également en plein essor. « Le diagnostic et la prise en charge doivent s'effectuer au bon moment et avec les bons outils. Enfin, Pour que l'accompagnement puisse être personnalisé, l'évaluation doit être globale et prendre en compte de multiples facteurs qui interfèrent sur ces processus. Ainsi, les comorbidités (troubles du sommeil, troubles anxieux, dépression…), le contexte de vie de chaque patient sont des dimensions à prendre en compte et qui nécessitent une prise en charge pluridisciplinaire », confie la Pr Jacquin-Courtois.
Une prise en charge pluridisciplinaire
La prise en charge pluridisciplinaire (MPR, orthophonie, psychomotricien, psychologue, neuropsychologue...) permet un meilleure accompagnement des troubles socio-émotionnels. Toutefois, certains patients présentent une symptomatologie complexe (handicap mental et/ou moteur importants) qui nécessite une prise en charge très lourde et qui rend difficile l’accompagnement sur le plan de la cognition sociale. D'autres, au contraire, présentent un tableau clinique moins sévère et peuvent accéder à cette prise en charge sur-mesure et pluridisciplinaire des troubles, dont les troubles socio-émotionnels. « Cette prise en charge est d’autant plus importante que ces troubles peuvent perdurer à long terme après une lésion cérébrale. Il faut donc pouvoir former les équipes médicales à l'intérêt de ne pas méconnaître cette composante socio-émotionnelle de la lésion cérébrale », conclut la Pr Sophie Jacquin-Courtois.
D'après un entretien avec la Pr Sophie Jacquin-Courtois, (hôpital Henry Gabrielle, Hospices Civils de Lyon)
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