La prise en charge des patients atteints de MICI (maladies inflammatoires chroniques de l’intestin) a été bouleversée par l’arrivée des anti-TNF, qui constituent aujourd’hui un volet important du traitement des formes sévères. Les règles de prescription sont très strictes et toutes les sociétés savantes recommandent de ne jamais faire appel aux anti-TNF chez les patients ayant un antécédent de cancer (tumeur solide) dans les cinq années précédentes.
« Cette règle, tout à fait respectée (avec une certaine souplesse en cas de carcinome cutané basocellulaire, de dysplasie ou carcinome in situ du col utérin), se fonde toutefois surtout sur le principe de précaution, les anti-TNF étant impliqués dans la cancérogenèse et leur effet potentiel venant s’ajouter à celui des immunosuppresseurs, eux-mêmes pourvoyeurs de cancers cutanés et de lymphomes », rappelle le Pr David Laharie. «Avec un recul de plus de 15 ans d’utilisation des anti-TNF, aucune étude, sauf une, n’a montré d’augmentation du risque de cancer et ce avec un niveau de surveillance maximal ».
Peut-on dans certains cas particuliers, envisager un traitement par anti-TNF dans le cadre d’une décision partagée ? « Le travail mené par le GETAID (Groupe d’étude thérapeutique des affections inflammatoires du tube digestif) apporte un début de réponse », souligne le Pr Laharie. Les données portent sur 79 cas où la règle des 5 ans a été transgressée dans des situations hors normes, pour lesquelles le médecin a jugé que le risque associée à la MICI était supérieur à celui lié au traitement par anti-TNF. Il s’agissait de cancers très variés, en termes de site (poumons, sein, peau..) et de profil évolutif (métastatique ou non). Au terme d’un suivi moyen de 2,5 ans, le taux brut de rechute du cancer a été de 19% (15 patients, dont 5 cas de carcinome basocellulaire). Chez 2 patients, la récurrence du cancer semble pouvoir être attribuée au traitement anti-TNF. « Le risque de rechute du cancer après traitement anti-TNF existe sans être très élevé, donnée qui concorde avec l’expérience des rhumatologues, dont les patients sont plus âgés. En pratique, il semble licite de pouvoir discuter dans certains cas de la mise sous anti-TNF malgré un antécédent de cancer en évaluant de façon très précise le rapport bénéfice/risque, dans le cadre d’une décision multidisciplinaire impliquant l’oncologue et partagée avec le patient », conclut le Pr Laharie.
D’après un entretien avec le Pr David Laharie, CHU de Bordeaux.
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