Le nombre d’amygdalectomies a nettement régressé, puisque les données du PMSI recensent 35 000 amygdalectomies par an chez les moins de 18 ans, pour 90 000 dans les années 1980. Elles ont pour indication, pour 80 % le syndrome d’apnées du sommeil, le reste étant lié à des angines récidivantes. Il s’agit très majoritairement d’amygdalectomies sous dissection, les amygdalectomies à la pince de Sluder qui ont terrorisé des générations d’enfants ne se pratiquent quasiment plus.
Les complications majeures sont les hémorragies, précoces (avant la 8e heure) dans 1 % des cas, tardives dans de 1 à 3 % des cas, selon une méta-analyse de 2005, avec, en France, un décès par hémorragie et un d’autre cause (en relation avec l’anesthésie, la prise de codéine, de tramadol…). La douleur postopératoire constitue un problème d’autant plus difficile à gérer que la codéine n’est plus recommandée en raison du risque de décès et de coma, chez les acétyleurs rapides en particulier, et que le tramadol fait courir les mêmes risques ; les AINS sont efficaces, et certaines équipes les utilisent, mais le doute sur un surrisque hémorragique n’a jamais été levé ; quant au paracétamol, son efficacité est nettement insuffisante dans ce cas.
Plusieurs techniques
Ce qui a amené à développer des techniques d’amygdalectomie intracapsulaire (dite aussi amygdalectomie partielle, résection amygdalienne, amygdalotomie) qui enlèvent du tissu amygdalien sans toucher à la capsule. Ces amygdalectomies subtotales peuvent se réaliser de diverses manières : résection classique aux instruments « froids », à l’aide de bipolaire, de radiofréquence, d’ultrasons, de microdébrideur, de coblation, etc. Aucune différence n’a été montrée sur le plan de la douleur ou du saignement entre ces différentes techniques.
La diminution des complications pourrait amener à les pratiquer de plus en plus en ambulatoire. « À Necker, nous utilisons depuis 2014 la radiofréquence pour l’exérèse amygdalienne, ce qu’il ne faut pas confondre avec les séances de radiofréquence menées chez l’adulte pour diminuer le volume des amygdales, explique la Pr Françoise Denoyelle de l’hôpital Armand-Trousseau (APHP). Nous avons réalisé 2 760 amygdalectomies en radiofréquence, 89 % pour SAOS, 5,5 % pour angines récidivantes et 5,5 % pour l’association des deux. Dans les suites, on a dénombré 12 hospitalisations pour saignements dont 5 reprises pour hémostase, 23 réinterventions en amygdalectomie totale dans un délai moyen de 16 mois, dont 22 % pour réapparition d’angines récidivantes et 78 % pour réapparition d’un SAOS. Ce qui nous amène, de façon assez empirique, pour des amygdales enchatonnées, à préférer faire d’emblée une amygdalectomie totale. »
Autre technique, le microdébrideur est un dispositif qui permet de sectionner le tissu par une lame rotative tout en aspirant les débris tissulaires. Il agit donc de façon uniquement mécanique. Quant à la coblation, elle combine effet radiofréquence et basse température afin de « vaporiser » le tissu amygdalien. Son utilisation pour l’amygdalectomie totale laissait planer un doute sur un risque hémorragique, qui n’est pas retrouvé dans l’amygdalectomie subtotale. Elle est intéressante quand l’abord pharyngé est difficile, que l’enfant soit très jeune ou qu’il existe une malformation.
Une réduction des saignements et des douleurs
Les ORL recourant chez l’enfant aux techniques intracapsulaires subodoraient qu’elles généraient moins de douleurs et de saignements. C’est maintenant prouvé par une première grande série suédoise analysée en 2013 chez 10 826 enfants de moins de 15 ans opérés pour obstruction respiratoire. Elle a montré une réduction massive des saignements par rapport à l’amygdalectomie totale (0,3 vs 1,8 % d’hémorragies précoces, 0,7 vs 5,8 % d’hémorragies tardives) ainsi qu’une diminution des appels pour douleur (5,6 vs 19,1 %). On estime maintenant que les douleurs sont divisées par sept.
Un risque de récurrence
En ce qui concerne l’efficacité de l’amygdalectomie partielle, une méta-analyse de 2017 montre une amélioration du score de SAOS à 6 mois globalement identique à celle de l’amygdalectomie totale. Par contre, le risque de récurrence à long terme – au-delà de 30 mois – est multiplié par 3,3 (8,2 % après une amygdalectomie partielle vs 1,6 %). Quant aux angines récidivantes, les équipes sont généralement plus réticentes à recourir à l’amygdalectomie partielle. Une seule étude, toujours suédoise, sur près de 15 000 personnes, montre une disparition des symptômes à 6 mois dans 98 % des cas, mais il faut prévenir les parents du risque de récidive à plus long terme. « Le risque de récurrence des angines est sans doute un peu plus élevé, ce qui est à mettre en balance avec le moindre risque hémorragique et la réduction de la douleur postopératoire. Néanmoins, l’exérèse subtotale n’est pas une bonne technique pour les angines récidivantes sur petites amygdales confinées dans les loges amygdaliennes », conclut l’ORL.
Communication de la Pr Françoise Denoyelle (hôpital Armand-Trousseau, Paris)
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