Le traitement de première intention des cancers mammaires métastatiques RH+/HER2- repose habituellement sur l’association d’un inhibiteur d’aromatase avec un inhibiteur CDK4/6 du cycle cellulaire. « Néanmoins, 40 % environ des femmes vont développer des mutations de résistance sur le récepteur aux œstrogènes (ESR1), qui contrecarrent l’action de l’hormonothérapie », explique le Pr François-Clément Bidard (IHU des Cancers des femmes/Institut Curie). Les résultats encourageants de l’essai académique Pada-1, précédemment conduit en France, avec un Serd (selective estrogen receptor degrador) injectable dégradant le récepteur aux œstrogènes, le fulvestrant, ont conduit les laboratoires AstraZeneca à concevoir une étude de phase 3, Serena-6, avec un nouveau Serd, plus puissant et administrable sous forme orale, le camizestrant. L’idée sous-tendant cet essai était de confirmer, par une étude mondiale en double aveugle, que l’on peut effectivement repérer les mutations ESR1 avant ré-évolution du cancer, et alors agir contre elles. La réponse est positive et le camizestrant s’est vu décerner le label de « thérapie innovante » par la FDA, signe d’une approbation accélérée à venir aux États-Unis.
Suivi des mutations au cours du traitement
Sur 3 256 femmes suivies grâce à des prélèvements d’ADN tumoral tous les deux à trois mois, toutes traitées au moins six mois en première ligne par létrozole, ou anastrozole, avec palbociclib, ribociclib, ou abémaciclib, 548 ont développé une mutation ESR1 en cours de suivi. Parmi elles, 315 ont été randomisées pour recevoir du camizestrant (75 mg/jour) ou rester sous anti-aromatase.
Une différence majeure de survie médiane sans progression a été observée entre les deux bras lors de l’analyse intermédiaire : 16 mois sous camizestrant contre 9,2 mois en cas de maintien de l’anti-aromatase (1). « Après deux ans, les taux de survie sans récidive étaient de respectivement 29,7 % et 5,4 % », rapporte le Pr Nicholas Turner (Royal Marsden Hospital, Londres). Le taux d’arrêts de traitement en rapport avec des effets indésirables a été faible dans les deux groupes : 1,3 % sous camizestrant, 1,9 % sous anti-aromatase.
« Le test ESR1 est disponible dans la plupart des centres d’oncologie ; on pourrait employer cette stratégie, dans les cancers du sein métastatiques, si les autorités françaises acceptent de la rembourser, souligne le Pr Bidard, premier auteur de la publication correspondante (1). D’autres études reposant sur le repérage d’autres mutations sont conduites dans les cancers du sein non métastatiques. » Il s’agirait alors d’étendre les applications cliniques au-delà des seules mutations ESR1.
Entretien avec le Pr François-Clément Bidard (IHU des Cancers des femmes/Institut Curie)
(1) Turner N. et al. Asco 2025, LBA4 et Bidard F.-C., et al. N Engl J Med. June 1, 2025
Article précédent
Cancer bronchique : une identification moléculaire des risques
Article suivant
Place aux anticorps conjugués
L’immunothérapie en première ligne
Des champs dans le cancer pancréatique
Cancer bronchique : une identification moléculaire des risques
L’ADN pour suivre et doubler le cancer
Place aux anticorps conjugués
Les anti-Parp aussi dans les cancers prostatiques mutés
L’ADN tumoral circulant résiduel, paramètre pronostique après cystectomie
Une association anti-Braf-anti-VEFR et chimiothérapie dans le cancer du côlon métastatique Braf muté
Les SMS de l’Asco 2025
CCAM technique : des trous dans la raquette des revalorisations
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024